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Libération

À livres découverts

par Frédérique Roussel
publié le 5 octobre 2010 à 10h55
(mis à jour le 5 octobre 2010 à 11h06)

Les origines de la Foire du livre de Francfort remontent à la fin du Moyen Âge avec l'invention de l'imprimerie par Gutenberg, tout près, à Mayence. Le livre imprimé naissait alors, bien loin de comporter des droits attenants comme le droit d'auteur. Aujourd'hui, à la Foire de Francfort , qui se tient du 6 au 10 octobre, on jongle avec les droits les plus divers dans un contexte où pèse de plus en plus le numérique. Mais c'est comme si tout le secteur se sentait à la veille d'un grand chambardement.

La chaîne du livre craint pour ses fondements, menacés par des géants du Net, par des fabricants d'écrans et une nouvelle espèce de diffuseurs. La législation, à double tranchant, risque elle-même de vaciller en voulant innover. La Fédération des éditeurs européens, relayée en France par le Syndicat national de l'édition (SNE), monte ainsi au créneau. Une pétition vise à alerter l'Union européenne sur le respect des droits d'auteur par les bibliothèques numériques. La commission réfléchit en effet aux moyens d'accélérer la numérisation des œuvres sous droit, notamment des orphelines (sans traces d'ayants droit) et des épuisées.

L'édition appréhende une législation générique, qui sauterait par-dessus l'éditeur, donc le droit d'auteur. «Afin de respecter l'exploitation commerciale de l'œuvre par l'éditeur, les différentes solutions nationales apportées à la question des œuvres orphelines et épuisées doivent se baser sur l'accord des ayants droit et sur la recherche diligente du statut de l'œuvre et non pas sur de nouvelles exceptions » , souligne le texte.

C'est une étude fouillée  sur le droit d'auteur en usage en Europe que publie par ailleurs le MOTif, observatoire du livre et de l'écrit en Ile-de-France. Commandée en novembre 2009, elle compare en détail les législations et pratiques contractuelles dans quatre pays, France, Allemagne, Espagne et Grande-Bretagne. Ses auteurs, Laure Pécher et Pierre Astier de l'agence Pierre Astier et associés, ont circonscrit leur exploration à la littérature générale, «un quart du chiffre d'affaires de l'édition» . Premier enseignement : la méconnaissance réciproque de professionnels sur les législations des autres pays. L'Espagne se distingue par une durée des contrats limitée à quinze ans, alors qu'ailleurs elle correspond à la durée de la propriété intellectuelle (soixante-dix ans après la mort de l'auteur).

L'étude évoque aussi la place trop peu représentative de l'auteur, le prix unique et les pratiques émergentes dans le numérique. Dans une autre pétition, le SNE rappelle que «les droits électroniques sont des droits principaux au même titre que les droits de l'édition papier dont l'exploitation revient naturellement à l'éditeur» . Et que... «les éditeurs doivent garder le contrôle sur le prix de vente de leurs livres sous format numérique» . Francfort, décidément, peut avoir des allures de veillée d'armes.

Paru dans Libération du 4 octobre 2010

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