«Nous sommes pour le retrait des sites à la source, non un masquage»

par Astrid GIRARDEAU
publié le 4 juin 2009 à 18h07
(mis à jour le 5 juin 2009 à 5h42)

Hier, Yves Le Mouël, directeur général de la Fédération française des télécoms commentait pour nous la Loppsi , la loi sur la sécurité intérieure. Plus précisément l'article 4 qui prévoit d'obliger les fournisseurs d'accès Internet (FAI) à bloquer une liste noire de sites pédo-pornographiques. Yves Le Mouël a rappelé l'inefficacité de tout dispositif de filtrage, tout en plaidant pour une responsabilité limitée et cadrée.

Une position partagée par l' AFA (Association des fournisseurs d'accès). A la différence que cette dernière milite pour un retrait à la source. Membre de plusieurs coopérations internationales, comme l' INHOPE , l'association a en effet un Point de contact qui permet le signalement de contenus illicites. «C'est plus intéressant d'agir à la source même, en effaçant un site plutôt que de le bloquer et qu'il reste hébergé à l'étranger» , nous expliquait, en mars dernier, Carole Gay , responsable affaires juridiques et règlementaires de l'AFA. Nous l'avons recontacté pour faire un nouveau point, le texte du projet de loi ayant été rendu officiel.

En mars, vous nous disiez ne pas avoir eu de contact avec le ministère de l’Intérieur depuis décembre. Vous en avez eu depuis ?

_ Non. Nous avons été invités à une réunion mardi dernier où on nous a présenté le texte, tel qu'il a été présenté le lendemain en conseil des ministres. Nous n'avons pas eu de communication officielle du texte. Aujourd'hui, nous ne pouvons pas faire grand chose. Nous attendons qu'il passe en commissions. Puis les débats à l'Assemblée et au Sénat.

Quelle votre position sur le blocage ?

_ Elle n'a pas changé. Nous sommes pour le retrait à la source, comme nous le pratiquons avec notre Point de contact. Et non pour un masquage. Comme l' Euroispa [ Association européenne de FAI ndlr ], nous pensons que le filtrage doit être utilisé en ultime recours. D'après les expériences qu'on voit à l'étranger, tout système de filtrage est inefficace, et des méthodes de contournement vont se développer.

Le texte reprend ce travail ?

_ Tout n'a pas été retenu de nos réunions de travail. Nous avions par exemple insisté sur le fait qu'il fallait que cela ne concerne que les sites étrangers, car pour les sites français il existe déjà la LCEN [ loi pour la confiance dans l'économie numérique de 2004 ndlr ].

La remise en cause du principe de subsidiarité est un point gênant. Ca veut dire qu'il n'y a plus besoin de recourir au juge pour s'adresser à un FAI. Du coup, on met tout au même niveau, hébergeur et fournisseur d'accès. Pourtant, c'est bien ce qui avait été fait, par exemple, dans l'affaire Aaargh. Les plaignants s'étaient d'abord adressé aux hébergeurs américains du site, puis aux FAI français.

Il faut que le recours au juge soit maintenu, car lui seul peut décider d'atteindre à la liberté de communication. Aussi, comme la FFT, nous estimons que l'obligation de résultat est techniquement impossible sur le blocage. Et nous espèrons que cela va reste cantonné à la pédo-pornographie.

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