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Libération

Après MegaUpload, la valse du partage

par Sophian Fanen
publié le 26 janvier 2012 à 12h46

Voilà de quoi réfléchir (encore un peu) sur le rapport entre les moyens investis pour poursuivre les téléchargeurs du quotidien et le résultat obtenu.

En présentant ses données annuelles, la Fédération internationale de l'industrie phonographique (Ifpi) a donné malgré elle des pistes intéressantes sur le sujet.

Tout d'abord, ses chiffres vérifient ce que l'on sait déjà: les (coûteux) systèmes du type Hadopi ont fait reculer l'usage du peer-to-peer pendant l'année 2011. En Belgique, le trafic sur The Pirate Bay a reculé de 84%... après que les FAI ont reçu l'ordre d'en bloquer l'accès. En Italie, c'est -74% sur Pirate Bay et BTJunkie, pour les mêmes raisons mécaniques.

En France, une étude appuyée par l'Ifpi (qui n'est pas une institution universitaire ou une ONG mais un lobby, rappelons-le) avance que l'usage du peer-to-peer a reculé de 26% depuis la naissance de l'Hadopi (voire avant, peur du gendarme oblige), avant de faire un rapprochement hasardeux entre ces internautes partis gambader ailleurs et la hausse des ventes sur iTunes (+22,5% sur les singles, +25% sur les albums).

Sauf que cette étude part de postulats lacunaires: elle ne s'appuie que sur les chiffres des ventes des majors du disque sur iTunes (pas de labels indés, pas de séries télé) et oublie la progression naturelle du magasin en ligne d'Apple dans les habitudes des internautes depuis plusieurs années déjà. Il n'est pas question de nier qu'Hadopi ait poussé certains vers l'offre légale d'Apple, mais le lien direct avancé par l'Ifpi est fragile. On pourra lire cet article pour aller plus loin sur ce sujet.

D'autant que depuis, la fermeture de MegaUpload pourrait avoir entraîné une nette progression du trafic sur... les réseaux peer-to-peer. Pourrait, parce que seuls les FAI peuvent fournir des chiffres complets et précis. En attendant, les sondages partiels (et partials ?) du fabricant de routeurs Ipoque sont une première indication, qui montrent un retour en grâce des requêtes BitTorrent et eDonkey en Europe dès la fermeture de MegaUpload.

Pour revenir à l'industrie de la musique, Frances Moore, la patronne de l'Ifpi, a également communiqué des données, reprises par Digital Music News , qui montrent que si vous tapez «nom de l'artiste + mp3», une large majorité des résultats (et de suggestions, comme le montre notre capture d'écran ci-dessus) affichés par les trois principaux moteurs de recherche renvoient vers des fichiers jugés illégaux. L'offre de contenu gratuit (ou peu coûteux) reste donc très présente, pédagogie ou pas.

Dans une interview à Billboard , Frances Moore souhaite en conséquence que les moteurs de recherche favorisent les sites légaux lors des requêtes. Les défenseurs d'une recherche neutre apprécieront sa vision des choses.

L'Ifpi a annoncé avoir lancé l'année dernière 15 millions de procédures de take down , c'est-à-dire des demandes adressées à des acteurs du web de supprimer un lien enfreignant un copyright.

Lire les réactions à cet article.

Pour aller plus loin :

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