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Libération

Après avoir captivé, la télévision capture

Développés pour les jeux vidéo, les capteurs 3D ciblent maintenant le petit écran. Avec la pub en ligne de mire.
par Erwan Cario
publié le 12 décembre 2011 à 11h21

Une envie pressante alors qu’on est affalé à regarder le dernier épisode de Homeland ? Hop, on se lève, et la télé se met en pause toute seule. Et lorsqu’on se rassoit, c’est reparti. Non, nous ne parlons pas ici du canapé connecté. Rien à voir. Car avec un réglage un peu plus fin, la vidéo peut même se figer dès qu’on tourne la tête et qu’on ne regarde plus l’écran. Aucune télécommande à chercher alors qu’elle s’était planquée entre les coussins, vive le progrès !

Cette fonction (très gadget, bien sûr) ne représente qu'une infime partie des possibilités qui seront offertes par les capteurs 3D qui équiperont les futures «Smart TV», les télévisions connectées. Cette technologie a déjà commencé à s'installer dans les foyers grâce à Kinect, la caméra de la Xbox 360 de Microsoft, mais le fait de pouvoir repérer un ou plusieurs corps dans l'espace peut très facilement dépasser le simple cadre ludique. C'est la conviction de Jeremie Kletzkine, en charge de la communauté des développeurs au sein de PrimeSense, société israélienne basée à Tel-Aviv qui équipe la partie capteur de la Kinect : «Le jeu vidéo a permis de faire connaître la technologie, mais ses usages vont bien au-delà. Les possibilités en terme d'interface sont immenses.» Et pour essayer de dynamiser la créativité autour de cette technologie, PrimeSense met à disposition sur Internet toute une série d'outils informatiques sous licence libre qui permet à tout développeur de créer ses propres applications.

La technologie de PrimeSense n’est en effet pas réservée en exclusivité à la console de Microsoft. Le constructeur Asus propose par exemple son propre modèle (Xtion Pro), qu’il est possible de connecter à un ordinateur pour faire joujou avec (on peut aussi «hacker» très simplement la Kinect avec le même résultat).

Parmi la cinquantaine d’applications déjà disponibles en téléchargement, on pourra noter Visikord, qui génère des effets visuels à partir des mouvements de danse devant l’écran, ou Choppers Game, qui permet le contrôle très fin d’un hélicoptère grâce à votre bras, en prenant en compte la position du poignet et du coude par rapport au corps.

«Ce n'est que le début, assure Jeremie Kletzkine. Nous voulons mettre en place un écosystème créatif autour de notre techno, d'où le choix du libre. Pour l'instant, les débouchés hors Kinect sont limités, mais ça va très vite évoluer.» Quelques projets sont d'ailleurs déjà en route, comme un système d'essayage virtuel de fringues et de reconnaissance automatique de la bonne taille en fonction de la morphologie de l'utilisateur.

La cible, c'est donc la télévision de demain -- il faut bien une «nouvelle nouveauté» après le flop cuisant de la 3D relief. On imagine déjà le système d'interface de Minority Report , où Tom Cruise manipule un écran avec ses deux mains qui s'agitent dans les airs. Mais l'eldorado est ailleurs, notamment dans un système de ventes d'applications identique à celui qu'Apple a mis en place pour ses iPhone et iPad. Et surtout, ce qui est bien plus flippant, dans la publicité contextuelle. Quand la télévision saura que sur le canapé, il y a deux adultes et un enfant, ou qu'une personne est en train de manger, la tentation du message «personnalisé» sera très grande pour les annonceurs. A ce stade de l'article, une référence à 1984 d'Orwell serait bien trop prévisible, non ?

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