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Libération

April : «Cette loi rejoindra prochainement la DADVSI dans les poubelles de l'histoire législative »

par Astrid GIRARDEAU
publié le 3 avril 2009 à 15h29

Le logiciel libre a eu la vie dure ces derniers jours lors des séances à l'Assemblée Nationale sur le projet Création et Internet. Malgré la défense de quelques députés, la ministre de la Culture, Christine Albanel, le rapporteur Franck Riester, et la majorité des députés UMP se sont montrés hermétiques à toute proposition d'interopérabilité, et plus généralement au logiciel libre. Selon Frédéric Couchet , délégué général de l'April, ils «pénalisent un secteur économique dynamique et innovant en s'en prenant injustement à ses acteurs» .

De nombreux amendements, tel le 437 ont pourtant tenté de faire intégrer l'interopérabilité dans le fameux logiciel de sécurisation prévu par la loi. Soutenant cet amendement, le député PS Christian Paul déclarait : «le problème que pose ce mouchard filtrant, (...), c'est que les spécifications de ces dispositifs seront, par construction, fondées sur l'impossibilité de toute modification du logiciel et sur l'interdiction de divulguer leur mode de fonctionnement. Ils ne seront pas compatibles avec la logique des logiciels libres, et cela exclura donc, que vous le vouliez ou non, les auteurs et les éditeurs de ces derniers.» Et s'adressant à la ministre, de lui demander «ou bien vous décrétez l'indifférence nationale contre le logiciel libre, ou bien vous nous dites comment c'est compatible» .

Comme sur toutes les questions techniques, la ministre et le rapporteur sont restés particulièrement imprécis. Voire à limite du ridicule quand Christine Albanel a déclaré :

«Lorsque l'on achète un pack Microsoft avec Word, Excel, Powerpoint, qui ne sont pas des logiciels libres, il existe des pare-feux, des logiciels de sécurisation ; mais les logiciels libres peuvent aussi être assortis de pare-feux. Ainsi, au ministère de la culture, nous utilisons le logiciel libre Open Office, et un logiciel de sécurisation l'accompagne. Les éditeurs de logiciels libres fournissent les pare-feux, et même des pare-feux gratuits.» Le lendemain, la député Martine Billard lui expliquera patiemment qu' «Open Office, c'est une suite bureautique. Une suite bureautique comporte en général un traitement de texte, un tableur et une base de données, mais pas de pare-feu. Un pare-feu, cela sert notamment à éviter les spams, les logiciels espions et les virus.»

Inquiets de leur non-prise en compte dans le projet de loi, mercredi dernier, quatre-vingt entreprises du logiciel libre (Mandriva, Mozilla Europe, Open Wide, Solinux, Smile, etc. ) adressaient d'ailleurs une lettre ouverte à Christine Albanel . Ils lui demandaient d'adopter les textes relatifs à l'interopérabilité et au droit de diffuser le code source,

mais aussi de limiter les fonctionnalités des « moyens de sécurisation » et tout forme de filtrage.

«Cette loi est inadaptée, inacceptable, inapplicable, d'ores et déjà dépassée, et liberticide. Elle rejoindra donc prochainement la DADVSI dans les poubelles de l'histoire législative » conclut Benoît Sibaud, le président de l'April.

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