Assange, un prophète du Net dans la croisade contre les «institutions»

par Christophe Alix
publié le 29 juillet 2010 à 10h08

Julian Assange, fondateur australien de l'autoproclamé «service de renseignement du peuple» , est un personnage pour roman et pas seulement d'espionnage. Inclassable, mystérieux et ultrasecret, cet activiste et hacker de la première heure constitue probablement la plus fascinante figure à laquelle la contre-culture libertaire d'Internet ait donné naissance.

Tombé tout petit dans la cryptographie, ce quarantenaire filiforme et à la chevelure warholienne bizarrement blanchie s'est fixé depuis quelques années une mission quasi sacrée : révéler, grâce au réseau mondial, les secrets que les méchantes «institutions» ont pendant des siècles cachés au monde. Son arme pour déjouer ce qu'il appelle la «conspiration gouvernementale» ? Un journalisme de dénonciation anonyme, brut et strictement factuel dont il entend faire une discipline «scientifique» et objectivement vérifiable, à l'égal des expériences de physique.

Le messianisme de ce militant en permanence sur ses gardes et qui vit désormais presque totalement caché prend ses racines dès son plus jeune âge, fruit d'une éducation totalement hors norme, comme le raconte l'hebdomadaire américain The New Yorker dans le portrait très fouillé qu'il lui a consacré début juin. Grandi «comme Tom Sawyer» , dit-il, dans un milieu alternatif sans jamais fréquenter le système scolaire, ce passionné de sciences, autodidacte de génie, a appris tout petit à penser contre le système. Marié et père à 18 ans, «Mendax» comme il se faisait appeler au sein de son groupe des «subversifs internationaux» a maille à partir avec la justice australienne dès l'âge de 20 ans lorsqu'il pirate les serveurs de la société Nortel à Melbourne. Nomade par excellence, ce lecteur de Kafka et Soljenitsyne voyage ensuite un peu partout, hébergé par des amis activistes, multipliant métiers et expériences.

Une vie d'aventurier durant laquelle il mûrit son projet de «fuites», cet outil en ligne conçu pour mener la «guerre de l'information» , contre les Etats et parfois aussi contre les journalistes professionnels, totalement dépassés selon lui. Ce sera WikiLeaks, né en 2006 et désormais en passe de devenir, à sa manière également, une «institution».

Paru dans Libération du 28/07/2010

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