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Libération

Au CSA, la parole de Nicolas Sarkozy ne compte pas

par Raphaël GARRIGOS et Isabelle ROBERTS
publié le 3 octobre 2007 à 0h29

Acroire qu'au CSA, ils n'ont pas la télé et n'ont pas vu qu'un certain Nicolas S. président de la R. squatte les écrans sans discontinuer depuis bientôt six mois.

Hier, selon nos informations, lors de sa réunion plénière hebdomadaire, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a rédigé une bafouille à François Hollande qui le renvoie sur les roses. Le premier secrétaire du PS avait saisi le CSA la semaine dernière au sujet du «temps d'exposition médiatique» du Président. Pour Hollande, l'hyperactivité médiatique de Sarkozy «doit désormais être pris [e] en compte au même titre que [le temps] du gouvernement». De même que les multiples allocutions de ses collaborateurs, de Claude Guéant à Henri Gaino.

Actuellement, hors période électorale, le temps de parole des politiques doit respecter un équilibre entre gouvernement, majorité et opposition à parts égales. Et le président de la République ? Il n'apparaît nulle part. Le CSA minute son temps de parole, mais il n'est imputé à aucune des catégories.

Mais que fait-on quand Nicolas Sarkozy est à la fois Président, Premier ministre, ministre de l'Intérieur, cumulant tous les maroquins ? L'Ina'Stat, le baromètre des JT établi par l'Institut national de l'audiovisuel (Ina) vient de publier des chiffres éloquents. Entre son élection en mai 1995 et le mois d'août suivant, Jacques Chirac était apparu 94 fois dans les JT et 75 fois sur la même période de 2002. Et Sarkozy ? 100, 110 fois ? Eh non : notre Président s'est matérialisé 224 fois sur le petit écran entre mai et août 2007! D'où la requête de François Hollande auprès du CSA.

Dans sa réponse, le Conseil se base sur la Constitution et une jurisprudence du Conseil d'Etat de 2005 qui estime que «le président de la République ne s'exprime pas au nom d'un parti ou d'un groupement politique». Ça se discute.

Alors, buté, le CSA ? Inféodé à la majorité qui a nommé tous ses membres ? Certes, mais le CSA rappelle qu'il n'a pour fonction que d'appliquer les lois, pas de les faire. Et puis, explique un membre du Conseil, «l'esprit de la lettre à Hollande c'est de renvoyer à la commission Balladur sur la réforme des institutions dont fait partie un certain Jack Lang, que Hollande doit connaître». En clair : si vous voulez que ça change, changez les institutions.

Ça tombe bien : c'est ce que veut faire Laurent Fabius qui, dans le débat sur le temps de parole du Président, est allé plus loin que son camarade François. Dimanche, Fabius a annoncé qu'il entendait déposer un amendement afin de faire modifier la Constitution. Son idée ? Que le temps de parole dévolu au gouvernement inclue également celui du président de la République et de ses collaborateurs.

En attendant, le CSA continue de faire ses petits relevés des interventions de Nicolas Sarkozy. Pour du beurre.

RAPHAËL GARRIGOS et ISABELLE ROBERTS

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