Aux Etats-Unis, le livre cherche son prix

par Fabrice Rousselot
publié le 3 mai 2012 à 10h17

Apple et cinq des plus grandes maisons d’édition américaines se sont-ils entendus pour tenter de contrer Amazon sur le marché des livres numériques ? La question est au cœur de la guerre des prix qui se joue actuellement aux Etats-Unis et s’intensifie au gré du succès grandissant des eBooks.

Début avril, le département de la Justice n'a ainsi pas hésité à intenter une action contre Apple et ses congénères, assurant que le petit groupe était tombé d'accord pour essayer de maintenir artificiellement les prix de chaque eBook à 12,99 ou 14,99 dollars (9,80 ou 11,30 euros). Le gouvernement américain accuse les éditeurs et Apple d'avoir enfreint les règles de la concurrence «en fixant des prix élevés d'un commun accord» , afin de tenter de résister à la nouvelle offre d'Amazon qui a décidé d'établir le prix de chaque livre numérique vendu sur sa tablette Kindle à 9,99 dollars (7,55 euros).

Jusque-là, trois maisons d'édition (HarperCollins, Simon&Schuster; et Hachette Book Group) souhaitent trouver un terrain d'entente avec le gouvernement et ont ouvert des discussions, tout en rejetant les accusations portées contre elles. Les deux autres, Penguin et Macmillan n'ont, pour l'instant, pas montré une quelconque volonté de négocier. Quant à Apple, il reste silencieux alors que, dans ses documents, le gouvernement cite des déclarations de feu Steve Jobs lors du lancement de l'iPad où ce dernier admettait son intention de fixer leprix des eBooks avec plusieurs partenaires, «même si le consommateur doit payer un peu plus» .

L'intervention de l'administration Obama montre à quel point l'eBook a relancé une concurrence acharnée entre les maisons d'édition qui dominent le marché américain, obligées désormais de compter avec l'arrivée des nouveaux géants du Net. Certains experts ont même critiqué la plainte déposée par le département de la Justice, en estimant que «tout cela fait le jeu d'Amazon et que les autres se retrouvent injustement pénalisés» .

«Le problème, c'est qu'il n'existe aucune règle , précise un éditeur chez HarperCollins qui préfère garder l'anonymat. Entre les auteurs qui s'autopublient et qui peuvent décider de vendre certains ouvrages à 99 cents (74 centimes d'euros) s'ils le veulent, les sociétés comme Amazon qui sont prêtes à tout révolutionner et les maisons d'édition traditionnelles qui veulent aussi leur part du gâteau, c'est la foire d'empoigne.»

Pour de nombreux professionnels de l’édition, l’impact du prix des eBooks sur le secteur va se faire sentir très rapidement et devrait entraîner une baisse des prix pour les livres papier, même s’ils restent toujours plus chers à distribuer et à produire.

Paru dans Libération du 2 mai 2012

De notre correspondant à New York

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