Menu
Libération

Coupe-papier à «la Presse»

par Jérôme Houard
publié le 30 mars 2011 à 8h53

L'information a fait figure de révolution dans le monde des médias : la Presse , le plus grand quotidien francophone d'Amérique du Nord, et vaisseau amiral du groupe Gesca, va rendre payants ses contenus web et réduire son tirage quotidien de 200000 à 75000 exemplaires. Calquée sur le modèle de la téléphonie mobile, l'idée consiste à offrir un iPad -- ou autre tablette électronique -- contre tout nouvel abonnement de trois ans minimum. But de l'opération, parvenir à générer des revenus pérennes grâce aux abonnements, tout en réduisant considérablement les coûts liés à l'impression et à la distribution.

Mais très vite, le quotidien le Devoir a révélé que ce sont en fait tous les journaux de Gesca, soit sept au total, qui seraient finalement concernés par cette vaste entreprise de dématérialisation, idéalement prévue pour 2013.

Tant par son ampleur que par son caractère avant-gardiste, le «plan iPad» suscite déjà toutes les curiosités. Selon Stéphane Baillargeon, spécialiste des médias au Devoir : «Il s'agit d'une première mondiale pour un quotidien de cette taille et la première intention de dématérialisation massive révélée la semaine dernière a vite fait le tour du monde.» Contacté par Libération, il estime que cette annonce fait souffler un vent nouveau sur le monde de l'information. «Tous les patrons de presse sont à la recherche d'un modèle économique viable. La formule est novatrice, audacieuse, et elle pourrait s'avérer rentable, c'est très séduisant. Enfin, sur le papier» , ironise-t-il. La direction de Gesca, pour l'heure plutôt avare en commentaires, estime qu'il est trop tôt pour dévoiler un projet qui n'en est qu'à ses débuts. Sûrement. Mais peut-être faut-il aussi voir dans ce silence la volonté de préserver un secret industriel. Car il ne fait aucun doute que les concurrents de Gesca, que l'on imagine peu enclins à se laisser distancer, vont observer à la loupe ce changement de paradigme.

«Dans la course à la dématérialisation, le top départ vient d'être donné» , analyse Stéphane Baillargeon. Avant de citer la Newspaper extinction timeline du futurologue américain Ross Dawson, qui prévoit la disparition des journaux imprimés d'ici 2017 aux États-Unis et 2020 au Canada.

Paru dans Libération du 29 mars 2011

Lire les réactions à cet article.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique