Création et Internet : Le PS propose la «contribution créative»

par Astrid GIRARDEAU
publié le 19 février 2009 à 14h09
(mis à jour le 19 février 2009 à 14h48)

Quelque peu absente des débats autour du projet de loi Création et Internet, la licence globale a fait son retour hier. La Tribune a en effet révélé que le groupe socialiste avait déposé un amendement visant à instaurer une sorte de licence globale pour la musique, soit la possibilité pour les internautes «d'échanger librement entre eux» des morceaux contre un paiement forfaitaire. Proche de ce qui avait déjà été proposé en 2005, lors de l'examen de la loi DAVDSI, le schéma a été rejeté par la Commission des Lois. Mais le sujet devrait réapparaître lors des discussions à l'Assemblée Nationale qui démarreront autour du 10 mars.

«Je suis heureux que cette proposition soit remise sur la table du débat. Même si elle n'a pas été adoptée en Commission des Lois, elle pourra être proposée à nouveau lors du débat d'ensemble» , nous a indiqué Philippe Aigrain, auteur du livre Internet & Création , dans lequel il propose, en détail , un système d'échanges basé sur un financement mutualisé, baptisé «contribution créative».

C'est d'ailleurs le terme repris par l'amendement déposé par le groupe socialiste, rapporté par PC Inpact , et qui indique : «Les organisations professionnelles du secteur du phonogramme s'accordent par voie d'accords professionnels sur la mise en place d'une "contribution créative". Les sociétés de perception et de répartition des droits sont associées. Ce dispositif, en contrepartie du paiement d'une contribution forfaitaire par les abonnés à un service de communication au public en ligne fournissant un haut débit, devra autoriser les mêmes abonnés à échanger entre eux sans but de profit sur internet les œuvres phonographiques incluses dans le mécanisme de rémunération. À compter du 31 décembre 2009, à défaut d'accord, la loi fixe les modalités de mises en œuvre de cette contribution créative.»

La notion de «global» a effet un peu perdu de son sens. Le système serait réservé aux abonnés haut débit, limité au secteur de la musique, et aux morceaux concernés par les accords. «Dans mon livre, j'ai recommandé un dispositif qui à terme couvrirait l'ensemble des médias, mais tout en acceptant le principe d'une introduction d'abord pour certains médias, la musique étant un candidat de choix» , positive Philippe Aigrain. Il reste cependant prudent quant à l'installation d'un tel dispositif : «si une contribution créative portant sur un seul média est mise en place, il faudra cependant prendre garde à ce qu'on n'installe pas en même temps des dispositifs de surveillance et répression automatique qui reprendraient d'une main la liberté donnée de l'autre.»

Déjà mardi dernier, lors de l'audition de Christine Albanel, la Ministre de la culture, devant la Commission des lois, les socialistes présents réintroduisaient la notion de licence globale, en opposition au projet de projet Création et Internet qu'ils considèrent comme «archaïque» voire «furieusement ringard» (Christian Paul). Ils ont surtout répété que c'était «un pari perdu d'avance» et «une nouvelle perte de temps» qui ne va générer aucun revenu pour les créateurs. Selon eux, il faut d'urgence réfléchir à de nouveaux systèmes de rémunération «adaptés à l'ère numérique» . La ministre a de son côté campé sur ses positions : «La licence globale est fondée sur l'expropriation des droits. Cela découragerait les éditeurs de développer des offres légales.»

On peut cependant regretter que le texte reste timide, et flou dans les détails. Par exemple sur la somme forfaitaire ou le système de rémunération des détenteurs des droits d'auteur et droits voisins. «En ce qui concerne le montant de la contribution, il devra y avoir un débat fondé sur les chiffres réels de la rémunération et du financement de la création et la réalité des échanges sur internet et de leur impact. J'y contribuerai , a précisé Philippe Aigrain. Ce qui est vraiment prometteur, c'est que la mise en place de la contribution créative proposée permettrait d'expérimenter les bénéfices de la libération des échanges en termes de diversité culturelle et de rémunération de la création et des acteurs à valeur ajoutée qui y contribuent.»

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