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«Des clics et des claques» qui se perdent

Sur Europe 1, l’émission animée par Laurent Guimier traque la tendance et l’actualité par le prisme du Net. Pas vraiment révolutionnaire…
par Erwan Cario
publié le 31 août 2011 à 10h37
(mis à jour le 31 août 2011 à 11h17)

Ce pourrait être une énième émission radio de débat sur l'actualité du jour, avec invités et chroniqueurs, qui donne la parole aux auditeurs. Mais non, il ne faut pas s'y tromper. Du lundi au jeudi, de 20 heures à 21 heures, avec Des clics et des claques , Europe 1 fait dans le moderne et le connecté. Rien à voir avec la radio d'antan. Ici, on parle de Twitter, de Facebook, du Web et du mail. Sans oublier le sacro-saint «buzz-sur-Internet» , répété ad nauseam . L'émission est conduite par Laurent Guimier, qui dirige aussi les sites d'information de Lagardère Active, accompagné de ses «aiguilleurs du Web» , Guy Birenbaum et David Abiker (absent en première semaine).

Le concept, Guimier l'a expliqué en introduction de la toute première émission : «Parler en toute liberté de tout ce qui buzze sur Internet et donc de vos conversations à la maison ou au boulot demain.» Et que buzze-t-il donc, ce diable d'Internet ? La semaine dernière, entre autres : DSK, la Libye, les JMJ et la rigueur économique. On a certes vu plus numériques, comme sujets, mais pas d'inquiétude, oubliés les vieux débats à la naphtaline, ici, on tweete du hashtag pour réagir en direct (et en toute liberté, bien sûr) et c'est signalé grâce à un petit cui-cui sonore du meilleur goût. Ça change tout. Par exemple, sur DSK, un internaute : «Franchement, même s'il est disculpé, il peut difficilement revenir sur la scène politique, il va faire tête basse.» Eh oui, 140 signes, c'est bien connu, ça favorise l'originalité et la pertinence !

Des clics et des claques - dommage qu'ils n'aient pas écrit «cl@ques» -, c'est avant tout l'incantation numérique et des mots clés à répétition, avec notamment la phrase magique «on en parle beaucoup sur Internet», qui sied à tous les sujets (vous pouvez essayer chez vous avec l'aquariophilie). Et le «buzz-sur-Internet» , bien sûr. Avec par exemple ce monument qu'est la «météo du Web» , présentée par le communicant Emery Doligé. Grâce au concept plutôt fumeux de «signaux faibles sur les réseaux sociaux» , il prédit l'avenir et ces «choses qui vont faire l'actualité, voire le buzz» (on appréciera la hiérarchie).

Phénomène étrange, quand le sujet devient franchement connecté (le «live-tweet», l'usurpation d'identité), l'émission reprend une distance de sécurité avec le sujet ( «c'est bien de rigoler, mais il y a aussi des abus» ), comme si, au-delà de son rôle de vernis de modernité, Internet restait un monde lointain peuplé de gens au comportement étrange.

Paru dans Libération le 30 août 2011.

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