Menu
Libération

«Diablo 3» : Blizzard a quinze jours pour calmer la tempête

par Camille Gévaudan
publié le 12 juin 2012 à 13h38
(mis à jour le 12 juin 2012 à 16h01)

Mauvais anniversaire, Diablo III ! Voilà un mois (à trois jours près) que le jeu de rôle tant attendu est arrivé entre les mains de ses millions d'aficionados, les joues alors mouillées d'émotion. Mais pour beaucoup d'entre eux, l'indicible sentiment de plénitude retrouvée s'est rapidement transformé en frustration : les serveurs du studio Blizzard n'étaient pas prêts à supporter l'afflux soudain de connexions, et une impressionnante proportion de joueurs s'est heurté à un message d'«erreur 37» en voulant activer leur jeu en ligne. Un mois plus tard, les problèmes ne sont toujours pas résolus et on commence à craindre des vagues de suicides.

L'association de défense des consommateurs UFC-Que Choisir s'est donc fâchée tout rouge. Elle a annoncé hier avoir mis en demeure la société américaine Blizzard de remédier sous 15 jours aux problèmes de connexion et de «communiquer sans délai de manière très transparente sur les mesures mises en place pour atteindre cet objectif» . Deuxième réclamation : un dédommagement de tous les joueurs ayant subi un préjudice.

Alerté par des gamers mécontents, UFC a d'abord mesuré l'étendue du problème en lançant la semaine dernière un appel à témoignages sur son site Internet. Les réponses ne se sont pas fait attendre : «En quatre jours seulement, plus de 1500 utilisateurs ont donné leur avis» ... et quasi exclusivement ( «90% des témoignages» ) pour dénoncer les problèmes d'accès aux serveurs de Blizzard.

Outre la saturation due au succès du jeu (3,5 millions d'exemplaires écoulés le jour de sa sortie), on recense également un paquet de pépins liés à la qualité de la connexion Internet des joueurs : pour peu que celle-ci ne soit pas très performante, il n'est pas rare de se voir refouler des serveurs. Or, l'accès à Internet est obligatoire non seulement pour activer le jeu et le lancer pour la première fois, mais également pour continuer à l'utiliser, à chaque session de jeu. «Aux heures de pointe, [des joueurs] voient s'afficher un message d'erreur leur indiquant que la connexion est impossible ou sont déconnectés sans avoir été prévenus en pleine partie, perdant ainsi les dernières armes et pièces d'or collectées» , raconte l'UFC.

Déconnecté en pleine partie...

L'obligation d'être connecté en permanence est malheureusement une tendance de plus en plus répandue chez les éditeurs de jeu vidéo, qui espèrent ainsi éviter le piratage ou la copie de leur jeu en vérifiant à distance et en permanence que le joueur est bien propriétaire du logiciel qu'il utilise. De cette manière, non seulement les gamers vivent un enfer de problèmes techniques, mais en outre, ils deviennent totalement dépendant du bon vouloir de l'éditeur du jeu : si Blizzard décide de couper ses serveurs dans quelques années, plus personne ne pourra jouer à Diablo III . C'est d'ailleurs écrit noir sur blanc dans les conditions d'utilisation: «Le jeu est concédé sous licence et non vendu» (article 6) et Blizzard «s'engage à fournir les serveurs et les logiciels nécessaires pour accéder au service jusqu'à ce que le jeu ne soit plus édité» (article 11).

Inadmissible, pour l'UFC Que Choisir : «Comment peut-on obliger les consommateurs à se connecter pour jouer seuls dans un pays où la qualité des infrastructures et leurs performances est assez relative parce que le très haut débit n'est pas développé ? Une fois de plus, le développement des mesures techniques de protection se fait au détriment du consommateur, piégé par les choix des éditeurs.» L'association critique particulièrement les mesures de protection anti-copie, dites «DRM», qui «altèrent très significativement les usages, puisque le consommateur ne peut jouir de ce jeu comme bon lui semble (par exemple chez un ami, dans un lieu public, etc.), tout en étant soumis à des dysfonctionnements très gênants (une coupure de réseau qui fait perdre le bénéfice de la partie) et cela sans aucune contrepartie tarifaire (les prix ne baissent pas).»

Conclusion , partagée et criée par des millions de joueurs mécontents de l'évolution des choses depuis des années : «Il n'est pas acceptable que les consommateurs ne puissent pas jouer à un jeu payé entre 50 et 60 euros dans de bonnes conditions.» L'UFC précise donc qu'outre sa mise en demeure à l'attention de Blizzard, elle interviendra auprès de la Direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) pour qu'elle se saisisse du dossier. Le but est carrément d'engager «un travail sur la politique commerciale des éditeurs» et leur utilisation abusive des DRM, en espérant infléchir la tendance actuelle avant que la situation ne devienne (plus) invivable (qu'aujourd'hui).

À lire également :

- Diablo 3, l'heure hache (15 mai 2012)

- Diablo 3 : «Il est impossible de se lasser» (15 mai 2012)

- Silence on joue ! Diablo III, Minecraft et Walking Dead

Lire les réactions à cet article.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique