Europe : l’extrême droite faux-cilisée

par Tania Kahn
publié le 9 novembre 2012 à 18h51

De jolies dames, sagement coiffées, apprêtées, mais qui derrière leurs bonnes manières, éructent les discours les plus haineux et racistes que l’on puisse entendre aujourd’hui. L’objectif de ce documentaire, le Populisme au féminin ? Montrer que l’extrême droite n’emprunte pas toujours les traits d’un Jean-Marie Le Pen, mais se dissimule parfois sous le sourire charmant d’une femme aux abords des plus respectables.

Archétype. Elles sont six, et elles sont toutes blondes. Krisztina Morvai, la Hongroise, était avocate spécialiste des droits de l’homme à l’ONU avant de prendre la direction du parti extrémiste Jobbik. Féminine et souriante, elle ne cesse de passer la main dans ses cheveux. La Norvégienne Siv Jensen, à la tête du très droitier Parti du progrès, est l’archétype de la célibataire endurcie, elle est par ailleurs ceinture noire de karaté. Pia Kjærsgaard préside le nationaliste Parti populaire danois, c’est une petite dame, la soixantaine, très policée. En Belgique, Anke Van Dermeersch, une ex-miss-actrice-mannequin, siège au Sénat pour le parti nationaliste flamand Vlaams Belang. Il y a aussi la Suissesse Céline Amaudruz, de l’UDC, fan d’équitation mais surtout d’idées ultraconservatrices et, enfin, Marine Le Pen, présentée comme la chef de file d’extrême droite la plus médiatisée.

On découvre dans ce documentaire un florilège des horreurs fomentées par ces formations extrémistes. Le parti nationaliste danois a imposé au gouvernement la règle des 24 ans : un Danois ne peut convoler avec une étrangère qu’à la triple condition d’être âgé d’au moins 24 ans, de justifier de moyens financiers conséquents, et d’être capable de prouver à tout moment son attachement au pays. Pire, le parti nationaliste flamand offre une rémunération à quiconque dénoncera une femme voilée à la police. Et on en passe…

A pas comptés, entre les grands-messes de ces partis et les interviews d’experts en politique, ce documentaire raconté à trois voix, celle des auteurs Hanna Ladoul, Matthieu Cabanes, Marco La Via, dresse un panorama sans concession de l’extrême droite contemporaine.

Dommage, la fin du docu s’éparpille en se tournant vers la jeunesse d’extrême droite au lieu de s’en tenir à son sujet : les femmes, et la stratégie de conquête de respectabilité des FN et compagnie.

Glissement. Pourtant le concept est séduisant : trois jeunes journalistes, aux origines métissées, et qui se présentent comme tels, décryptent le monde dans lequel ils évoluent et vont devoir voter. Rassurant. On peut toutefois regretter qu’Hanna Ladoul, Matthieu Cabanes et Marco La Via aient intitulé ce docu le Populisme au féminin, opérant un drôle de glissement entre la notion de populisme (qui concerne gauche et droite) et celle d’extrême droite. Comme si cette dernière en avait le monopole.

Paru dans Libération du 9 novembre 2012

Le populisme au féminin

_ Documentaire réalisé par Hanna Ladoul, Matthieu Cabanes et Marco La Via

_ LCP, ce soir à 20 h 30.

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