Extension des domaines d'Internet

Les adresses des sites web devraient prochainement être totalement compatibles avec les différents alphabets du monde.
par Astrid GIRARDEAU
publié le 12 octobre 2007 à 18h41

Actuellement, tous les sites, qu'ils soient en français, mandarin ou russe, ont un nom de domaine de haut niveau («.org», «.com», «.fr» dans le cas de «ecrans.fr») en caractères romains. Une situation de moins en moins acceptée par les pays n'utilisant pas l'alphabet latin qui réclament l'internationalisation des noms de domaines. Un premier pas sera fait lundi avec le lancement par l' ICANN , l'organisation qui gère les noms de domaines sur Internet, de sites en onze alphabets non latins.

Aujourd’hui, la partie dite de haut niveau des noms de domaine est obligatoirement en ASCII. Ce code est composé de 37 caractères : 26 lettres de l’alphabet latin + 10 chiffres + le tiret. Depuis 2003, le nom de domaine lui-même - la partie avant la terminaison («ecrans» dans «ecrans.fr») - peut être internationalisé, c’est-à-dire comprendre des caractères n’appartenant pas au code ASCII : les lettres particulières de l’alphabet latin (accent, cédille, etc.) et tous les caractères n’appartenant pas à l’alphabet latin (voir exemple ci-dessous).

Devant la lenteur de changement du système, les critiques pleuvent depuis des années. Impatients, certains pays ont même créé des systèmes parallèles avec leurs propres noms de domaine. En face, l'ICANN répond en évoquent les difficultés techniques de modifier un tel système. Ainsi, l'année dernière, Paul Twoney, le directeur de l'ICANN, déclarait que la pression politique exercée sur leur organisation ne les ferait pas aller plus vite. «Avec les noms de domaine internationaux, on essaie de changer les fondations (d'Internet).» lançait-il.

Finalement, après quatre années de développement, l'organisation a annoncé qu'elle lançait, lundi prochain, une phase d'évaluation. Il s'agit en fait de tests sur des sites wikis qui seront accessibles depuis le site de l'ICANN, via des URL intégralement en onze alphabets : arabe, chinois, perse, russe, hindi, grec, coréen, yiddish, japonais et tamoul. Par contre, l'ICANN n'a avancé aucune date sur la mise en place réelle du système. Le Wall Street Journal parle de fin de l'année prochaine.

Pour les pays concernés, cela serait une évolution culturelle et une avancée face à la domination de l’anglais sur Internet. D’autant que si l’anglais reste la première langue utilisée (31%), son hégémonie est peu à peu grignotée, entre autres par la Chine qui comprend aujourd’hui 16% de la population internaute. Plus largement, on peut même parler de victoire contre la main-mise des Etats-Unis sur la gestion des noms de domaine. Historiquement, l’ICANN est en effet étroitement lié au gouvernement américain, fondée à l’origine par le Département du Commerce américain.

Cependant, quelques ombres sont pointées du doigt. La première, soutenue par l'ICANN , est une crainte que cela ouvre la multiplication du phishing, cette pratique qui consiste à tromper les internautes grâce à la diffusion de fausses adresses Internet d'établissements bancaires ou d'administrations. La seconde, plus discutable, est la peur d'une régionalisation du web. Interrogé par le WSJ , Paul Mockapetris, l'inventeur du système des noms de domaine, résume ainsi la question : «L'internationalisation des noms de domaine est une énorme évolution vers une balkanisation ou vers une unification d'Internet. On verra dans dix ans.»

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