Il y a dix jours, Les Numériques interviewait Olivier Henrad, le conseiller juridique de Christine Albanel au Ministère de la Culture et de la Communication, au sujet de la mise en œuvre de la loi Création et Internet. Dans ses éléments de réponse, assez flous, deux nous avaient particulièrement interpelé : les moyens de recours et la fin des systèmes de réseau sans fil communautaires type FON. Une annonce a laquelle a répondu cette semaine, le président de FON France, Jean-Bernard Magescas.
Le premier point surprenant, que nous avions brièvement relevé , concerne l'invitation de l'abonné qui a reçu un avertissement «à produire de lui-même les preuves de son bon comportement devant la Haute Autorité de façon à couper court au contentieux le plus tôt possible.» Et comment donc fait-il cela ? Simplement en fournissant son disque dur au juge qui pourra alors vérifier «si vous êtes coupable ou innocent» , explique Olivier Henrad. Avec aisance, le conseiller mélange donc disque dur, avec ordinateur, avec adresse IP, avec abonnement Internet. Quelque que soit le type de filtrage, rien ne permet aujourd'hui à un juge de vérifier que le disque dur fourni par le présumé coupable corresponde à ce qui aura été repéré par l'ayant-droit lors de l'infraction.
Le journaliste, Vincent Alzieu , en vient ensuite à la sécurité des accès à Internet, décrite par Henrad comme «la philosophie du texte» de la loi. A la question «cela signifie-t-il la fin des partages de connexion Wifi pour cause idéologique : réseaux FON, partage social... ?» , Henrad répond : «oui, même si en réalité ce système de responsabilité est déjà en place dans la loi, article L335 12 du Code de la propriété intellectuelle. Cette mesure vous rend responsable des personnes placées sous votre surveillance, ce qui s'étend donc aux enfants, aux animaux, à votre véhicule.» En une phrase, il signe donc l'arrêt de mort des réseaux sans fil communautaires, tels que proposés par FON . Créé en 2005 par Martin Varsavsky, le réseau FON permet d'accéder à Internet selon l'une des trois solutions proposées. Le «Linus» partage sa connexion et utilise gratuitement celle des autres adhérents, l'«Alien» ne partage pas sa connexion mais achète des pass pour se connecter sur l'un des points d'accès FON, et le «Bill», partage sa connexion et utilise gratuitement celle des autres adhérents mais aussi reçoit une partie des pass achetés pour utiliser son point d'accès.
FON france, via la voix de son président, Jean-Bernard Magescas, n'a pas tardé à réagir à l'annonce. Interviewé par FrancoFON , ce dernier déplore tout d'abord que «M. Olivier Henrard n'ait même pas pris la peine de les contacter afin de connaître un minimum son sujet lorsqu'il décide de tuer des initiatives telles que FON.» Après avoir remis en cause les capacités du conseiller -- «il semble clair que M. Henrard est dépassé par les sujets qu'il aborde» --, il invite le conseiller (et le ministère) à venir en parler à FON «s'ils veulent comprendre les réseaux de nouvelles technologies.» Magescas indique préparer une lettre à Christine Albanel «afin de lui demander des explications concernant ce genre de déclaration et de bien vouloir fournir les documents et études qui leurs ont permis d'arriver à une telle conclusion» .
Il conclut : «Il est grand temps qu'une délégation parlementaire soit constituée et chargée de faire un bilan de l'existant dans ce domaine, notamment de produire les études d'impact nécessaires» .