Facebook a 5 ans, 150 millions d'amis, et besoin de pubs

Trois jours avant l'anniversaire du réseau social, un article du Telegraph a tiré la sonnette d'alarme sur la stratégie publicitaire de Facebook.
par Alexandre Hervaud
publié le 4 février 2009 à 17h46

Facebook a 5 ans aujourd'hui et un peu plus de 150 millions de membres. Cet anniversaire, «c'est une occasion joyeuse pour Facebook» comme le révèle son perspicace créateur Mark Zuckerberg, né en 1984. Pourtant, trois jours plus tôt, la fête ne s'annonçait pas si funky, la faute à un article qui a bien failli tout gâcher.

Dans le genre «titre effrayant», le britannique Telegraph a donc fait fort, lundi dernier, en publiant sur son site un article intitulé Le réseau social titre profit de ses amis . Et d'accentuer le ton alarmiste en sous-titrant : «le fondateur de Facebook a finalement trouvé un moyen de monétiser les données personnelles de ses 150 millions de membres» . Le journaliste relate une démonstration assez impressionnante de sondages en temps réel via Facebook donnée à Davos, le week-end dernier, dans le cadre du Forum économique mondial . D'après lui, «les entreprises multinationales pourront bientôt cibler des membres pour leur recherche marketing. Elles pourront poser des questions à des membres spécialement sélectionnés selon des critères intimes comme leur situation familiale ou leur orientation sexuelle» .

Mark Zuckerberg et Jet Li à Davos, le week-end dernier - CC Robert Scoble

Pris de pitié pour une catégorie professionnelle qui n'en mérite peut-être pas tant, on imagine la détresse du service communication de Facebook face à une telle bombe. Sauf que ladite bombe s'est avérée être un pétard mouillé, le journaliste du Telegraph ayant commis quelques amalgames et autres imprécisions. Pas question par exemple pour Facebook d'offrir sur un plateau les données personnelles de ses membres. Et la technique de sondage massif utilisée à Davos a été réalisée avec des outils internes que Facebook ne mettra pas à disposition des entreprises .

L'inquiétude du Telegraph est pourtant compréhensible, et il faudrait faire preuve d'une naïveté confondante pour ne pas se soucier de la politique publicitaire de Facebook. Les utilisateurs tenant à leur vie privée ont encore en tête le fiasco Beacon , summum de la réclame intrusive qui avait valu en 2007 un tel flot de critiques que le site avait dû faire marche arrière et modifier cette fonction. En 2009, la situation n'est pas forcément meilleure. La preuve avec les déclarations de Matt Hicks, représentant de Facebook : «Nous ne sommes pas sur le point de lancer un outil de recherche marketing. Aucune donnée personnelle n'est mise en vente.» Tout va bien, donc, jusqu'au laconique : «On ne partage rien sur la vie privée d'un utilisateur, à moins que l'utilisateur n'ait choisi de le faire» . Un certain Marc L. l'a récemment bien compris.

Pour en revenir à la publicité dite «sociale» prônée par Facebook, le site a mis en place depuis l'automne dernier un nouveau système pour le plus grand plaisir des annonceurs, les engagement ads . Le principe est simple : si une marque souhaite communiquer via cette fonction, elle choisit un type d'utilisateur (la cible, pour causer marketing) qui verra sur sa page d'accueil une publicité «interactive», par exemple avec une question du type sondage. Si l'internaute décide d'y répondre, son statut le signalera à tous ses amis qui pourront également faire de même. Une sorte de marketing viral involontaire beaucoup plus intéressant (pour les marques comme pour Facebook) que les publicités traditionnelles.

La stratégie publicitaire de Facebook révèle surtout la difficulté croissante pour les réseaux sociaux d'engranger des revenus conséquents. Twitter devrait par exemple annoncer en avril prochain un plan pour monétiser son audience : le San Francisco Chronicle évoque la possibilité de faire payer aux entreprises des comptes «pro» avec des moyens facilités pour entrer en contact avec leur cible. Un temps évalué à 15 milliards de dollars, le trombinoscope de Zuckerberg aurait depuis perdu, crise économique oblige, une partie de sa valeur, également fragilisée par les coûts grandissant du stockage de données.

Depuis la polémique lancée par le Telegraph , qui aura eu le mérite de médiatiser un peu les fameuses engagement ads , les signes de méfiance vis-à-vis de Facebook (déjà bien relancée par l'affaire Le Tigre ) se multiplient. Par ici, un post du blogueur Korben qui tombe à pic ( 10 conseils pour éviter de petits ennuis avec sa vie privée sur Facebook ), par là celui d'un vénérable enseignant-chercheur gréviste ... Sans compter le retour en grâce des sites détaillant la marche à suivre pour supprimer définitivement son profil.

Hasard du calendrier, les nominations pour la prochaine cérémonie des Big Brother Awards France (BBAF) sont ouvertes depuis la semaine dernière. Si d'aventure, vous avez désormais en tête un individu, une entreprise méritant la suprême distinction qui sera remise le 4 avril prochain, n'hésitez pas à suggérer leur nomination sur le site des BBAF .

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