France Télévisions : Moins belle la vie

par Raphaël GARRIGOS et Isabelle ROBERTS
publié le 1er octobre 2012 à 13h53

La vie est moche parfois. Fin 2008, début 2009, les députés PS, alors dans l’opposition, combattaient la loi de Nicolas Sarkozy qui allait supprimer la pub avant 20 heures sur France Télévisions. Ils dénonçaient la mainmise de l’alors président de la République sur le service public, fustigeaient la dépendance financière dans laquelle était désormais plongée France Télévisions et s’alarmaient des conséquences de la crise sur le budget de la télé publique.

Septembre 2012, les socialistes désormais aux affaires taillent à coups de hache dans le budget de France Télé. 85 millions d'euros en moins, 3,4% de réduction de budget dit-on du côté du groupe public, 60 millions et 2,3%, temporise une source gouvernementale. Dans tous les cas, une baisse historique. Et c'est France Télévisions qui morfle le plus : Radio France, Arte, l'Institut national de l'audiovisuel (INA), l'Audiovisuel extérieur de la France (AEF) ne baissent que d'un chouïa (0,3 à 0,5%). «L'audiovisuel public participera à l'effort de redressement des finances publiques» , dit le projet de budget 2013. Doux euphémisme. Pour le député PS Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, «c'est l'injustice de cette situation qui fait que, trois ans après, tout ce que nous avions dénoncé en 2009 arrive. Nous payons aujourd'hui l'imprévision de Sarkozy et ses méthodes d'apprenti sorcier, et la facture est salée.»

Ouch. À France Télévisions, où une grève contre cette «asphyxie financière» aura lieu mardi, on accuse le coup qui vient s'ajouter à un manque à gagner de 50 millions d'euros sur les recettes publicitaires. La télé publique paye ses audiences déclinantes et peut-être aussi son Rémy Pflimlin de président, nommé par Nicolas Sarkozy. Lequel Pflimlin, toujours placide, refuse de voir la cible sur son front : «C'est le contexte général du budget» , déclare-t-il à Libération . Pour autant, il mesure le boulot qui l'attend : «La marche 2013 est extrêmement haute. À partir du moment où les moyens sont en baisse, il faut revoir les objectifs.» Comprendre qu'il va lui falloir ferrailler avec le gouvernement sur les pistes d'économies : tailler dans les effectifs, dans les programmes, dans les rédactions ( lire ci-contre ). Léger baume, l'audiovisuel public bénéficiera d'une augmentation de la redevance : 4 euros, dont 2 au titre de l'inflation, peanuts. Et Bloche se dit prêt, lors de l'examen du budget à faire un effort «si jamais ce n'est pas tenable» . Enfin, le gouvernement a annoncé avoir provisionné 1,3 milliard d'euros pour pallier le retoquage attendu à Bruxelles d'une des taxes qui financent l'arrêt partiel de la pub. C'est toujours ça que Pflimlin n'aura pas à trouver en économies…

Mais le gouvernement a-t-il une ambition pour la télé publique suspectée, et parfois coupable, de nombreux maux ? Pflimlin l'attend : «Nous avons à discuter de l'ensemble de nos missions mais je pense que, plus l'offre de télévision devient infinie, plus nous avons besoin d'un service public fort, c'est une question éminemment politique, au sens noble du terme. » Mais la ministre de la Culture et de la Communication, Aurélie Filippetti, n'a pas trouvé vendredi le temps de la moindre explication au coup de bambou infligé à France Télévisions.

Paru dans Libération du 29 septembre 2012

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