Google-Facebook : la valse-imitation

La firme de Mountain View tente une nouvelle incursion dans les réseaux sociaux, dernière manne qui lui échappe.
par Erwan Cario
publié le 30 juin 2011 à 12h16
(mis à jour le 30 juin 2011 à 18h14)

Google est partout. Google est puissant. Google est incontournable. Google est le maître de l'Internet mondial. Oups, pardon, on est allé un peu vite. Il reste en effet un pan du Web qui échappe au géant : le social. Non, pas le sujet de la précarité dans le monde du travail, mais bien celui incarné par Facebook et ses 700 millions d'amis. Le gâteau est de taille, et primordial pour pouvoir assurer la croissance de ce qui est le centre névralgique du modèle économique de Google : la publicité ciblée. La firme de Mountain View trépigne. Comment celle à laquelle tout réussit (ou presque, lire l'article ) peut-elle laisser échapper la manne du «J'aime», de la photo du petit dernier et des considérations hautement philosophiques sur le temps qu'il fait aujourd'hui ? Ce n'est pourtant pas faute d'essayer. Nouvelle tentative hier avec le lancement de «Google+». C'est loin d'être la première.

Google possède par exemple, depuis 2004, Orkut, un réseau social de 100 millions de membres, mais qui a la particularité de n’être utilisé pratiquement qu’au Brésil et en Inde et de passer inaperçu dans le reste du monde. Refusant de rester inactif face à la montée en puissance du réseau de Mark Zuckerberg, Google lance Wave en mai 2009. Présenté comme un mix entre le bon vieux mail, la messagerie instantanée, le principe des wikis et l’aspect communautaire des réseaux sociaux, Wave se révèle en fait trop complexe et bénéficiant d’une interface idéale pour les doctorants en informatique. Indigeste, il ne séduit qu’une poignée d’utilisateurs très motivés qui s’en servent surtout pour des travaux collaboratifs.

Moins d'un an plus tard, en janvier 2010, Google lance Buzz, qui tente de séduire les utilisateurs de la messagerie Gmail en proposant un système de partage d'info à mi-chemin entre les statuts Facebook et les messages de Twitter. L'idée est de profiter des millions de comptes Gmail existant pour éviter le syndrome de la boîte de nuit vide, cauchemar des jeunes réseaux sociaux : le DJ peut passer la meilleure musique du monde, s'il n'y a pas un chat sur la piste de danse, personne n'entre. Problème, dans la précipitation, Google oublie un léger détail : la vie privée de ses utilisateurs. Au lancement, il est par exemple possible d'avoir accès très simplement aux noms des contacts privilégiés d'un utilisateur de Buzz. La faille est corrigée, mais trop tard pour éviter pas mal d'ennuis judiciaires, dont une retentissante class action . Et pour pas grand-chose au final. Buzz ne prend pas. La piste reste désespérément vide.

Mais le sujet est trop important, Google refuse de s'avouer vaincu et vient donc de mettre en orbite Google+, en version bêta accessible uniquement sur invitation. «Pour que les échanges sur le Web soient plus vrais que nature» , explique le texte de présentation. On y parle de «cercles», de «déclics» et de «bulles», espérant convaincre les internautes de venir danser. Et pour tenter de préremplir un peu plus la piste, Google compte sur les possesseurs de téléphones, notamment ceux tournant sur le système maison, Android. Mais c'est sur la forme que le résultat est troublant. Au-delà de quelques trouvailles d'interface plutôt séduisantes - on peut déplacer ses amis très simplement dans de jolis cercles pour faire… des cercles d'amis -, on se retrouve tout simplement sur un ersatz de Facebook. Comme si Google avait renoncé à aborder le sujet d'une manière qui lui serait propre. Le DJ a décidé de passer la même musique que la boîte d'à côté qui cartonne. Pas sûr que les badauds fassent le déplacement.

Lire les réactions à cet article.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique

Les plus lus