Google Italie héberge et plonge

par Eric Jozsef
publié le 26 février 2010 à 10h36
(mis à jour le 26 février 2010 à 10h37)

Pour «atteinte à la vie privée» et «diffamation» , le procureur de Milan Alfredo Robledo avait requis un an de prison contre Google. Les dirigeants du géant de la Toile n'iront pas en taule, mais trois d'entre eux ont tout de même été condamnés, hier, à six mois de réclusion avec sursis par la justice italienne.

«C'est une première dans le monde» , a immédiatement reconnu le moteur de recherche américain, qui s'indigne de cette décision. David Drummond, ancien président du conseil d'administration de Google Italie, et deux de ses collaborateurs ont en effet été reconnus coupables d'avoir hébergé, en 2006, un film amateur montrant un adolescent handicapé violemment pris à partie par ses camarades dans une salle de classe d'une école turinoise. Le premier frappe à coups de poing et de pied la victime, un deuxième dessine le symbole des SS sur le tableau puis fait le salut fasciste, tandis qu'un troisième filme la scène devant une dizaine d'autres élèves impassibles.

La vidéo en question a été diffusée en septembre 2006 et est restée en ligne environ deux mois avant de provoquer un scandale dans la péninsule. L'école a alors sanctionné les auteurs des violences en les excluant de l'établissement. De son côté, Google a retiré le film d'Internet. Mais les magistrats italiens, sollicités par une association de familles d'handicapés, ont estimé que l'affaire méritait une suite judiciaire, estimant que les responsables du moteur de recherche avaient l'obligation juridique d'empêcher la diffusion de cette vidéo qui a été visionnée 5500 fois. «À travers ce procès, nous avons posé un problème sérieux, à savoir la protection de la personne humaine qui doit prévaloir sur la logique d'entreprise» , a détaillé Alfredo Robledo. L'accusation a notamment laissé entendre que Google avait tardé à intervenir malgré les protestations d'internautes. Le délit de «diffamation» n'a toutefois pas été retenu.

Hier, Google s'est dit «profondément préoccupé par cette décision stupéfiante qui représente une attaque contre le principe de la liberté d'expression». «Nous ferons appel» , a précisé un porte-parole de l'entreprise, qui a souligné que les responsables du moteur de recherche «n'ont rien à voir avec cette vidéo. C'est la possibilité d'offrir des services sur Internet qui est en jeu» . Pour Reporters sans frontières, «cette condamnation instaure de facto un contrôle a priori sur la publication de vidéos» .

Paru dans Libération du 25 février 2010

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De notre correspondant à Rome.

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