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Libération

Google: Pékin s'en moque et pas qu'un peu

par Camille Gévaudan
publié le 14 janvier 2010 à 16h15
(mis à jour le 15 janvier 2010 à 12h01)

«La loi chinoise proscrit toute forme de piratage informatique.» D'une phrase lapidaire, le ministère chinois des affaires étrangères a balayé les demandes d'explications que Google, soutenu par le gouvernement américain, lui avait adressées hier . Mais Google n'avait pas explicitement accusé Pékin d'être à l'origine de la vaste opération de surveillance d'e-mails découverte le mois dernier, et Pékin n'a pas explicitement envoyé Google sur les roses : la porte-parole du ministère, Jiang Yu, s'est bornée à répéter que les questions informatiques devaient être adressées aux «départements compétents» . A un journaliste qui demandait si la loi s'applique aux agences chargées du contrôle d'Internet, aucune réponse n'a été donnée. Exit donc, le fâcheux incident diplomatique.

Quant aux menaces de Google de lever toute censure dans les résultats de son moteur de recherche, la réaction chinoise est sans surprise. «L'Internet chinois est ouvert et le gouvernement encourage son développement» , mais pour des raisons de «responsabilités sociales» , le Bureau de l'information du Conseil d'État n'est pas prêt à transiger sur les filtres appliqués au réseau : «Guider l'opinion publique sur Internet est une mesure garantissant la sécurité de l'information en ligne» . Toutes les entreprises implantées sur le sol chinois sont tenues de s'y plier, Google ou non, menaces de fermeture du site ou non.

La balle est à nouveau dans le camp de Mountain View. «Nous espérons qu'ils en viennent à accepter que c'est un nouveau siècle, un temps nouveau. Je pense qu'il y a encore, au gouvernement ou chez les hackers, certains éléments de totalitarisme en Chine, mais il est temps pour eux de cesser et de laisser au peuple chinois un accès libre à l'information» , explique une source interne citée par The Guardian . Google veut tenter une poursuite des négociations, résolument optimiste -- ou sérieusement inquiet de voir arriver l'heure où il faudra envisager la fermeture de ses services en Chine. Le moteur de recherche Baidu, qui domine actuellement le réseau chinois avec plus de la moitié des parts de marché, serait le principal bénéficiaire de ce retrait et a déjà vu son action bondir de 13,7% hier. Google perdrait également l'opportunité de distribuer son nouveau smartphone en Chine. Le Nexus One est pour l'instant disponible uniquement aux Etats-Unis, mais il devrait traverser les frontières au cours de l'année et la Chine représente un juteux marché, avec ses 280 millions d'abonnés mobiles et une prévision de hausse des ventes de portables à hauteur de 21% en 2010. La décision s'annonce difficile.

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