Hadopi : Demandez le programme !

par Astrid GIRARDEAU
publié le 30 mars 2009 à 10h28
(mis à jour le 30 mars 2009 à 20h22)

L'examen du projet de loi Création et Internet reprend donc cet après-midi à l'Assemblée Nationale. Les débats vont redémarrer autour de l'article 2, qui définit le rôle, les missions, le fonctionnement de l'Hadopi, la Haute autorité administrative indépendante au cœur de dispositif prévu par le gouvernement. Résumé du programme qui nous attend dès la première séance, à 16 heures.

Quelques amendements à l'article 2 ont déjà été examinés le jeudi 12 mars. Ainsi le 403 , qui s'oppose «au caractère disproportionné de la sanction encourue par les abonnés sans que ces derniers ne puissent bénéficier des garanties procédurales habituelles» et condamne l'absence de «procédure contradictoire dès la première recommandation, non application de la présomption d'innocence et du principe de l'imputabilité et possibilité de cumuler sanctions administratives et pénales» . Ou le

338 simplement hostile «à la création d'une Haute Autorité dotée de pouvoir jusqu'alors réservés au pouvoir judiciaire, ainsi qu'au mécanisme de riposte graduée.» Si ces amendements ont été rejetés, ces sujets ne sont pas clos, des textes similaires ayant été déposés par les députés, principalement de l'opposition.

La séance devrait démarrer par l'examen de l'amendement 406 qui propose une évaluation du dispositif dans les dix-huit mois (ce qui n'a jamais été fait pour la DAVDSI). S'en suivra une série d'amendements sur l'organisation même de l'Hadopi, composée d'un Collège et d'une Commission de Protection des Droits (CPD). Il sera par exemple question de la présence d'un membre de la CNIL ou de représentants des internautes au sein du Collège.

Ensuite, les députés aborderont de nouveau le sujet de l'autorité judiciaire. Par exemple, les amendements 352 , 353 et 429 , déposés par les députés Jean-Pierre Brard et Martine Billard, estiment que permettre «à l'Hadopi de demander l'identification des personnes liées à une adresse IP collectée par les sociétés d'auteurs en dehors de toute intervention de l'autorité judiciaire, le projet de loi est contraire à la décision du Conseil constitutionnel» . En 2004, ce dernier permettait aux sociétés d'auteurs, dans le cadre de la lutte contre le téléchargement, de traiter des fichiers d'infraction, mais avec la garantie que «les données ainsi recueillies ne pourront, (...) acquérir un caractère nominatif que dans le cadre d'une procédure judiciaire» .

L'amendement 115 rappelle lui qu «'il est important de maintenir le contrôle d'un juge pour l'accès aux données personnelles des internautes» . Pour, rappel, en juin dernier, le Conseil d'Etat remettait en cause le fait que l'Hadopi puisse accéder aux données de connexion des internautes et les utiliser à des fins répressives sans contrôle de l'autorité judiciaire. Une mesure aujourd'hui uniquement autorisée dans la lutte contre le terrorisme. Seule l'autorité judiciaire « peut ordonner toute mesure propre à faire cesser ou prévenir une atteinte au droit d'auteur ou droit voisin, occasionnée par le contenu d'un service en ligne » , écrivait alors le Conseil d'Etat .

Les amendements 250 et 432 , eux, visent à exclure la «possibilité de cumuler sanction administrative et sanction pénale» car, selon le projet de loi, il sera en effet possible, pour les même faits, d'être jugé par l'Hadopiet pour délit de contrefaçon (jusqu'à 30000 euros d'amende et cinq ans de prison).

Autre sujet qui va ressurgir : la labellisation des offres légales et leur sur-référencement sur les moteurs de recherche . Le 19 février dernier, le rapporteur Franck Riester, déposait un amendement visant «à la mise en place ainsi qu'à l'actualisation d'un système de référencement de ces mêmes offres par les logiciels permettant de trouver des ressources sur les réseaux de communications électroniques» . Une formulation alambiquée sous-entendant le sur-référencement de certains sites labellisés sur les moteurs de recherche. «Cela constituerait une forme de censure» , réagissait Google France. Quelques jours plus tard, le ministère de la culture évoquait un «malentendu» . Le député UMP Lionel Tardy a néanmoins déposé le 167 demandant la suppression de ces points. Il écrit : «cet amendement établit une distorsion de concurrence entre les sites commerciaux qui bénéficieraient du label et les autres sites, en permettant aux sites labellisés de se retrouver en tête des résultats dans les moteurs de recherche, ce qui est un avantage absolument décisif sur internet. Il y a là une rupture d'égalité caractérisé, qui apparaît absolument anticonstitutionnelle.»

Enfin, on notera un consensus autour du principe qu'on ne peut sanctionner un internaute ayant téléchargé illégalement un fichier absent des sites d'offres légales. Un groupe d'amendements, déposés par des députés des différents partis ( 312 , 51 433 et 252 ) va ainsi dans ce sens. «Cette solution permettra de motiver directement les ayants-droits français» , commente, par exemple, Franck Riester. Ce sont les ayants droit des Beatles qui doivent être contents.

Il s'agit d'un avant-goût des débats de la journée autour des cent premiers amendements de l'article 2. Et il en reste encore deux cents derrière....

Les débats pourront être suivis en direct dès 16 heures sur le site de l'Assemblée Nationale . Pour ceux qui souhaiteraient assister aux séances, toutes ouvertes publiques, un petit mode d'emploi est disponible ici.

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