Hadopi: Le web en ordre de bataille

par Andréa Fradin
publié le 30 septembre 2010 à 18h07
(mis à jour le 1er octobre 2010 à 15h34)

Ça s'agite, ça s'agite dans le web français. Ben oui, forcément, après plus d'un an attente, la grosse machine Hadopi vient de s'enclencher : l'arrivée de la première fournée de mails d'avertissement est IM-MI-NEN-TE. On imagine l'agitation aux abords de la rue de Texel. Mais aussi de l'autre côté du front. Car dans le clan des anti-Hadopi aussi, l'excitation est à son comble. Remontés comme des coucous, ils guettent la première salve pour mieux organiser la riposte. Une attention fébrile mais active: les anti minent le parcours de la Haute autorité. Dissections des textes, farces bénignes, mais aussi menaces d'attaques pirates: les anti-Hadopi sont sur les dents !

Hadopi, c'est mon data

Numerama , que l'on sait hyperactif sur les frasques hadopiesques, a décidé de devancer le site de la Haute autorité, que l'on attend toujours, avec Hadopi-data.fr . «Si la transparence ne se fait pas d'en haut , écrit Guillaume Champeau, elle s'imposera par le bas» . Le site se présente comme une vigie de «l'ensemble de l'activité de la Haute autorité.» Accessible, la base de données de cet outil collaboratif a pour ambition de cartographier les envois de l'Hadopi: abonnés visés, FAI consultés, œuvres culturelles de référence. Toujours aucune contribution pour le moment, mais on sollicite la touche F5 et on revient vers vous.

Hadopi.fr, c'est pas le site qui...

Autre site qui nous titille le reload , Hadopi.fr se fait toujours désirer. Et en attendant, il faut bien s'occuper.

Nous en parlions déjà il y a quelques jours , l'opportunité de lancer une attaque DDOS contre les serveurs du site suscite des débats passionnés et alimente d'un même coup tout un tas de papiers. Notamment évoquée par les Anonymous de 4chan, la menace ne fait pas l'unanimité chez les anti. Ainsi, le Parti Pirate , qui, comme le dit le secrétaire général de l'Hadopi Eric Walter, «a une grande audience auprès des geeks» , a tenté d'apaiser les esprits, jugeant «ces attaques vaines, contre-productives» , et susceptibles de stigmatiser les internautes. Analyse partagée par l'emphatique ReadWriteWeb , qui indique pour sa part que ces appels au déni de service ne sont que l'apanage de «script kiddies» , et non de «vrais hackers» , tout en soulignant néanmoins que ce mouvement pourrait bien se muter en «émeutes online» . Tremble Hadopi, tremble ! L'institution, de son côté, la joue stoïque: «d'aucun parlent de millions de hackers qui vont nous attaquer, d'autres de trois quatre personnes pas plus. J'en sais rien , se résigne Eric Walter. Si ça doit arriver, il n'y a de toute façon pas grand chose à faire face aux DDOS.»

En marge de ces pirateries programmées (ou pas), une capture d'écran de la home d'Hadopi.fr, postée sur Numerama , vient instiller un peu de légèreté dans l'affaire. Cette fuite amuse depuis hier les petits malins du web, qui se sont affairés pour retrouver les images qui servent d'illustration à la supposée page d'accueil. Résultat: il semblerait que ces clichés proviennent de banques d'images en ligne, comme GettyImages, qui associent des mots-clés très précis aux produits qu'elles proposent. Ainsi, la photo de home renvoie aux tags «afro-américain», «poils du visage», «heureux» et «ordinateur»; une autre , plus petite, aux termes «plaisir», «Asiatique de l'Est et du Sud-Est», «utiliser l'ordinateur». On imagine la scène de brainstorming au sein de la Haute Autorité qui a conduit à la sélection de ces images...

La Quadrature du net: «LOL Hadopi»

Vaincre le mal par le rire, tel est aussi le parti pris du collectif La Quadrature du Net. En marge de ses analyses et revues de presse, les activistes font appel à la force du LOL. «Parce qu'il ne faut pas avoir peur de l'HADOPI» , «parce que les mails de l'HADOPI ont à peu près la même valeur juridique qu'un vulgaire spam» , et «parce qu'avec les dizaines de millions d'Euros que coûte au contribuable cette usine à gaz dangereuse et obsolète, il vaut mieux en rire qu'en pleurer» , la Quadrature a ouvert un grand «jeu concours d'e-mails Hadopi» . Le principe est simple: le premier qui reçoit un mail d'avertissement gagne (entre autres) un tee-shirt arboré du logo Pi de la Quadrature et un coup à boire. Mais attention aux petits malins qui voudront copier/coller le modèle rendu public il y a quelques jours, les candidatures seront soumises à un examen poussé. Alors si vous êtes susceptibles d'être accusé d'un «défaut de diligence dans le maintien opérationnel du dispositif de sécurisation de votre accès Internet» , aérez votre adresse Free, Neuf ou Wanadoo, depuis trop longtemps laissée à l'abandon, et scrutez votre boîte de réception.

SOS à mort

Du côté des anti, on offre aussi la possibilité de lancer des SOS. Ainsi Sos Hadopi , le service commercial qui propose une aide «juridique et technique» aux internautes en peine, attend tout aussi fébrilement le débarquement des premiers mails d'avertissement. Car c'est aussi ce qui mettra mécaniquement son business en service.

On savait que la Haute autorité n'avait pas particulièrement apprécié le lancement de cette petite boîte, publiant dard dard un communiqué incendiaire accusant SOS Hadopi de diffuser des « affirmations totalement mensongères. » Une émission de Sud Radio , enregistrée le 27 septembre dernier et animée par Philippe Le Juste Prix Risoli permet de confirmer (dès la 66e minute) que l'Hadopi et sa version SOS entretiennent une relation plus proche du blizzard que d'une passion charnelle. A la grande surprise de Fifi, qui ne s'attendait pas à un débat «aussi chaud !» L'occasion aussi de découvrir, pour ceux qui en avaient pas encore eu la chance, «l'énormité» proférée (et de son propre aveu) par Eric Walter. «Lorsque vous éteignez votre ordinateur, votre ligne Internet est effectivement sécurisée» nous dit le secrétaire général de l'Hadopi. «Ça va faire rire, j'en suis conscient, peu importe» , ajoute-il. C'est bien noté.

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