Le système Hadopi devant la justice

par Sophian Fanen
publié le 13 février 2012 à 14h12
(mis à jour le 13 février 2012 à 14h24)

La lourde machinerie de l'Hadopi a finalement adressé à la justice «plusieurs» dossiers d'internautes selon elle responsables de «manquement à l'obligation de surveillance de l'accès à Internet» . Révélée ce matin par Le Point , l'information a été confirmée par la Haute autorité elle-même.

«Plusieurs» , c'est-à-dire «une partie des 165» abonnés dont le dossier a atteint le troisième et avant dernier palier de la riposte graduée confiée à l'Hadopi. Soit 165 abonnés sur 822000 avertis par un premier courrier recommandé et 68343 rappelés à l'ordre par un second au 30 décembre 2011, toujours selon l'Hadopi.

«Une personne qui a été avertie deux fois voit son dossier transmis à la Commission de protection des droits [la CPD, chargée de faire interface avec la justice, ndlr], explique-t-on ce matin à l'Hadopi. Les 165 personnes concernées ont ensuite été convoquées et ont pu se défendre, mais certaines ne se sont pas présentées.»

Sur «appréciation de la CPD» , une partie des 165 dossiers a donc été adressée «aux parquets des lieux de résidence» des internautes, sans que la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet ne soit en mesure de nous donner un chiffre plus précis. «C'est un flux continu qui est ouvert, il y aura donc d'autres transmissions dans les semaines à venir» , a-t-elle néanmoins précisé.

À partir de là, la justice prend le relais. C'est aux procureurs de décider si les preuves collectées par les services administratifs de l'Hadopi (adresse IP, nature précise des œuvres visées...) permettent ou pas de poursuivre un abonné devant un tribunal de police pour le fameux «manquement à l'obligation de surveillance de l'accès à Internet» , notion peu précise qui avait été attaquée lors des débats sur la loi qui a créé le système de riposte graduée. Un juge pourra alors décider d'une contravention de 1500 euros maximum, éventuellement couplée à une suspension d'abonnement d'un mois.

Très contestée depuis sa création, accusée à la fois d'inefficacité et d'entrave à la liberté sur le net, l'Hadopi est notamment dans le collimateur du candidat socialiste à la présidentielle. Dans son programme, François Hollande a annoncé qu'il remplacerait la loi Hadopi par «une grande loi signant l'acte 2 de l'exception culturelle française» , conciliant «la défense des droits des créateurs [et] un accès aux œuvres par internet facilité et sécurisé» . L'équipe de François Hollande avait précisé par la suite que l'envoi d'avertissement aux internautes qui pratiquent le téléchargement de fichiers soumis au droit d'auteur serait supprimé.

L'Hadopi dispose d'une réponse graduée face aux internautes accusés de piratage: l'organisation envoie d'abord par email une première recommandation puis, si l'internaute persiste, envoie par courrier recommandé et par email une deuxième recommandation après six mois. Puis, si le piratage est toujours avéré dans les 12 mois suivants, la Commission de protection des droits convoque les internautes, étudie les dossiers au cas par cas et décide ou non de les transmettre à la justice.

Hasard ou conséquence directe due à des représailles d'internautes, le site internet d'Hadopi était indisponible en milieu de journée.

Lire les réactions à cet article.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique

Les plus lus