Hiroshima, le noyau d’une guerre

par Isabelle Hanne
publié le 12 octobre 2011 à 18h25
(mis à jour le 12 octobre 2011 à 18h28)

«Monstre» , «progrès» , ou «mal nécessaire» : il y a soixante- six ans, l'utilisation de l'arme atomique ne faisait déjà pas consensus. La puissance américaine d'alors a pourtant réussi à unifier les voix pour ne garder qu'un seul message. Celui qu'on lit dans nos livres d'histoire : les bombes atomiques ont été larguées sur Hiroshima et Nagasaki dans le seul but de forcer les Japonais à capituler, et mettre un terme à une guerre qui n'en finit pas. Dans la Face cachée de Hiroshima , le documentariste japonais Kenichi Watanabe dévoile, implacable, les véritables enjeux d'une telle entreprise.

Après un parallèle, un peu rapidement ébauché, avec la catastrophe de Fukushima, le documentaire raconte la conquête de l'atome depuis ses origines, et la culture du secret qui l'a entourée. Au début de la Seconde Guerre mondiale, les Etats-Unis sont obnubilés par la peur de laisser les nazis prendre de l'avance. Le documentaire suit, pas à pas, l'élaboration de la bombe, en parallèle à l'évolution de la guerre. La Face cachée de Hiroshima raconte la naissance, en septembre 1942, du mystérieux Projet Manhattan, nom de code de l'opération secrète menée aux Etats-Unis pour mettre au point la bombe A. C'est ce projet qui formalise, toujours dans un secret absolu, l'alliance entre le monde scientifique, les industriels (Monsanto, Dupont de Nemours…), et la puissance militaire.

Trois ans plus tard, après des mois de travail sous haute pression, les deux bombes atomiques larguées au Japon, (70 000 morts sur le coup à Hiroshima, et 80 000 à Nagasaki, plus du double dans les mois suivants), permettent aux scientifiques de tester, grandeur nature, leur création. Et de mener des études poussées auprès des Japonais pour mesurer les effets dévastateurs de la radioactivité sur le corps humain… Tout en affirmant officiellement son caractère inoffensif. Côté politique, Hiroshima est une façon de démontrer au Congrès qu'il n'a pas dépensé ses millions de dollars pour rien. Le président Truman, lui, comprend très vite que cette bombe A, «l'arme absolue» ,va devenir une «carte maîtresse de la diplomatie américaine» . Sans interview, uniquement à l'aide d'un commentaire précis, de la lecture de correspondances de politiques et de scientifiques impliqués dans l'élaboration de la bombe, mais aussi d'ahurissants films de propagande, le film démontre le poids du silence et les manipulations qui entourent, depuis sa naissance, le nucléaire.

Paru dans Libération du 12 octobre 2011

La face cachée de Hiroshima

_ Docu de Kenichi Watanabe

_ France 3, ce soir à 20 h 35.

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