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Icann : Vers l'indépendance ?

Hier, Viviane Reding, la commissaire européenne à la Société de l'information a préconisé l'indépendance totale de l'ICANN. Pas si évident, selon le professeur en droit Cédric Manara.
par Astrid GIRARDEAU
publié le 5 mai 2009 à 17h54

Hier, Viviane Reding, la commissaire européenne à la Société de l'information a préconisé que l' ICANN , l'organisation privée chargée de la gestion des noms de domaine sur Internet, rompe tout lien avec le gouvernement américain. «C'est un signal politique. En même temps, l'Union européenne peut bien dire ce qu'elle veut, ce seront les Etats-Unis qui décideront, point !» , estime Cédric Manara, professeur de droit à l'EDHEC.

Depuis sa création en 1998, l'Icann (Internet corporation for assigned names and numbers), qui centralise au niveau mondial l'attribution des adresses IP et des extensions de domaine (« .com », « .net », « .fr »...), est sous tutelle du Département du Commerce américain. Si, dans un premier temps, cela avait semblé nécessaire, cette affiliation est aujourd'hui remise en cause par beaucoup. Entre autre par l'ICANN elle-même qui, en janvier dernier, dans une lettre envoyée au gouvernement américain , demandait son indépendance.

Alors que l'accord de l'organisme avec Washington (le «Joint Project Agreement») expire au 30 septembre 2009, Reding a ainsi déclaré : «c'est l'opportunité d'une privatisation complète de l'Icann et cela pose aussi la question de savoir à qui l'Icann devra rendre des comptes à partir du 1er octobre» . La commissaire s'est dite favorable à une indépendance totale de l'autorité sous la surveillance d'un organe judiciaire, sorte de tribunal international indépendant, et «d'un G12 pour la gouvernance d'Internet» qui comprendrait deux représentants par continent (trois pour l'Asie et l'Océanie) et le président de l'Icann.

«Je ne crois pas que l'Icann soit relâchée dans la nature car pour la gestion de l'Internet, c'est comme ça depuis le début , commente Manara . En 1998, il y avait eu des débats internationaux sur la gestion, les Etats voulaient que ce soit confié à l'Union internationale des télécommunications (UIT) ou à une nouvelle entité internationale. Les Etats-Unis ont écouté bien poliment et puis ils ont créé une société de droit californien, l'Icann donc. En 2006, certains utopistes ont cru que le gouvernement lâcherait la bride. Et puis...»

Il poursuit : «Là, depuis quelques mois, on entend de nouveau ces discours. Le 30 juillet 2008, c'était clair, les américains ne comptaient pas lâcher . Mais le 20 avril 2009, suite à la mise en ligne d'une consultation publique , certains ont cru y voir le signe que les Etats-Unis pensaient peut-être à laisser l'Icann vivre sa vie» .

La question reste très sensible. Ainsi, lors du deuxième Forum sur la Gouvernance de l'Internet qui s'est déroulé à Rio de Janeiro en novembre 2007, bien que la volonté d'internationalisation de l'Icann soit dans l'esprit de nombreux participants, «le sujet n'a été abordé qu'à mots couverts» rapportait alors Mathieu Weill , le directeur général de l'AFNIC. Un statu quo que Viviane Reding met sur le compte de l'administration Bush. Aussi elle a dit espérer qu' «après 8 années d'hésitation de la part des Etats-Unis, le Président Obama va continuer le travail entamé par l'administration Clinton.»

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