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Libération

IMDB face à la crise de la quarantaine

par Didier Péron
publié le 8 mars 2012 à 9h20

Qui connaît Junie Hoang ? Cette comédienne américaine d'origine vietnamienne a participé à pas moins de 93 films, une flopée de nanars aux titres évocateurs tels que All Purpose Cultural Cat Girl Nuku Nuku ou The Bong Connection .

Elle a aussi tourné dans Tonnerre sous les tropiques de, et avec, Ben Stiller, mais la séquence a été coupée au montage. Junie Hoang vient enfin de décrocher un gros article dans le quotidien the New York Times , non pour ses talents d'actrice mais parce qu'elle intente un procès, le premier du genre, contre les sites IMDb et Amazon, qu'elle accuse d'avoir révélé sa date de naissance sans son accord. Junie Hoang n'a pas l'air d'avoir 41 ans, bien qu'elle soit née en 1971.

Elle estime qu’IMDb, véritable mine contenant un nombre de données sans équivalent sur le cinéma international, a trahi le secret de sa date de naissance. Elle et ses avocats remettent en cause la manière dont les sites se seraient procuré cette information, qu’elle n’a délibérément jamais donnée. Miss Hoang pense que lorsqu’elle a effectué sa transaction d’abonnement par carte bleue à la partie professionnelle du site (IMDbpro), son véritable nom a été révélé (Huong Hoang) et qu’à partir de là, les webmasters ont pu découvrir son lieu et sa date de naissance (Saigon, 16 juin 1971).

Cette affaire peut sembler anecdotique, mais les conclusions du procès vont être suivies de près par tous ceux qui s’inquiètent de l’exploitation de données personnelles par un Internet toujours plus fouineur et affranchi de toute considération sur la frontière public-privé.

En octobre, date du dépôt de la plainte, la Screen Actors Guild avait par ailleurs critiqué IMDb en raison de la mention de la date de naissance en tête de chaque fiche. En effet, les efforts désespérés de tous les acteurs et actrices pour avoir l’air de ne jamais franchir le cap de la trentaine, à coup de piqûre quotidienne de botox, de nettoyage de rides au laser et de chirurgie esthétique, semblent inexorablement ruinés par simple consultation du site. Toutes choses préjudiciables, en particulier pour l’armée des ombres des studios qui doit lutter sur le double front de l’anonymat persistant et du déclin biologique.

Paru dans Libération du 7 mars 2012

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