Portrait

Il en a dans le clip

Depuis ses 11 ans, Rodolphe Pauly triture des images, qu'il colle désormais sur de la musique, notamment celle d'arthur H.
par Etienne SORIN
publié le 10 juin 2006 à 21h45

Sur un mur, un poster de Kalidor, supernanar d'heroic fantasy avec Schwarzenegger. Rodolphe Pauly revient de la cuisine avec un verre d'eau à la fraise. «Ça c'est pour un sketch qu'on a tourné, c'est pas la vraie déco.» En guise de déco, des étagères remplies de DVD. Pauly a l'appart et le look d'un étudiant en philo. Sauf qu'on n'y trouve pas les oeuvres complètes de Platon mais le coffret Kubrick. Sur un rayon, le trophée prend déjà la poussière. Victoire de la musique du meilleur clip pour Est-ce que tu aimes ? d'Arthur H (en duo avec M), pas mal pour un type de 24 ans. «Ça ne m'a rien apporté. Le téléphone ne s'est pas mis à sonner.» Ce touche-à-tout sans peur et sans complexe ne se plaint pas, il n'a jamais attendu qu'on l'appelle. «Je fais des films depuis que j'ai 11 ans. Après avoir vu Reservoir Dogs, ma première claque.» Des films de zombies et de gangsters en vidéo et en super-huit qu'il tourne avec une bande de potes dans une cave. Il a 15 ans quand Fidélité produit son premier court métrage en 16 mm, Les héros sont debout. Chabrol, un ami de la famille, le fait jouer dans Merci pour le chocolat (il tient le rôle du fils de Dutronc). Mais Pauly est moins un «fils de» qu'un enfant de la balle (mère scénariste et père réalisateur). Devant ou derrière la caméra, le cinéma n'est qu'un jeu. Il arrête le lycée pour y jouer plus souvent et réalise un court en 35 mm, Un trou dans la tête, dans lequel il interprète tous les personnages. Les rôles qu'il décroche ensuite sont le fruit de rencontres. Pas du genre de celles que les acteurs font dans le bureau de leur agent (il n'en a pas), mais de celles qu'on fait dans la rue. En traînant au Brady, la salle de ciné de Mocky, il atterrit sur le tournage du Furet. Sur l'air de «j'aime beaucoup ce que vous faites», il aborde Cédric Khan qui le fait tourner dans l'Avion. Il joue en ce moment dans les Amours d'Astrée et de Céladon d'Eric Rohmer. «Rohmer, c'est du niveau de John Ford. Un grand metteur en scène.»

Pour le clip, c'est à peu près le même refrain. Il zone avec le groupe de rap-musette Java et réalise le clip de Cendrier, remake trash de Cendrillon en crevard tabagique. Un bijou de style système D et BD (Margerin lui dessine une planche). L'expérience lui plaît, il harcèle Arthur H. «Il n'arrêtait pas de me dire de rappeler dans un mois, je rappelais un mois après. Un jour, il m'a dit : "J'ai une chanson, fais-moi un truc marrant."» C'est comme ça qu'il emmène H et M jouer aux cow-boys en forêt de Fontainebleau. Tout le monde est content et il récidive pour Ma dernière nuit à New York City, l'errance d'un gangster dans Manhattan, entre film noir et cartoon. «On l'a tourné en une journée dans un hangar à Montreuil. Il n'y a qu'un axe de caméra avec un fond en rétroprojection. Les images de gratte-ciel ont été chopées sur l'Internet par Pierre Pelle, le chef déco de Gondry, qui a travaillé les mouvements en 3D.»

Pauly continue à tourner des clips mais il a trois scénarios de longs métrages dans un tiroir. «Un film pour enfants qui demande un gros budget, un autre projet qui repose sur les épaules d'un artiste connu dont je ne peux pas dire le nom et une comédie qui parle de ces années où j'ai pris des vents.» Ces années-là, ça devait être à l'école maternelle.

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