Acta de décès en Allemagne ?

par Sophian Fanen
publié le 10 février 2012 à 18h54

Ça commence à sentir le roussi politique pour Acta , le Traité international de lutte contre la contrefaçon signé le 26 janvier à Tokyo et depuis critiqué de toute part, autant pour l'opacité des négociations, savamment tenues loin des parlements que pour les menaces qu'il ferait peser sur la liberté d'expression en ligne ou les médicaments génériques. De nombreuses manifestations pour demander le retrait du texte sont prévues demain en Europe et dans le monde.

Aujourd'hui, c'est l'Allemagne qui a suspendu le processus de ratification du traité par son parlement. «La signature ne va pas intervenir dans un premier temps afin de nous donner le temps de mener de nouvelles discussions , a indiqué un porte-parole du ministère des Affaires étrangères. La ministre de la Justice [Sabine Leutheusser-Schnarrenberger], chargée de ce dossier, a exprimé des réserves cette semaine.»

Négocié entre 22 pays de l'Union européenne (dont la France, mais pas l'Allemagne) et les représentants de l'UE elle-même, les États-Unis, le Japon, le Canada, la Nouvelle-Zélande, l'Australie, Singapour, la Corée du Sud, le Maroc, le Mexique et la Suisse, Acta vise à lutter contre la contrefaçon au sens large, depuis les médicaments et autres marchandises, jusqu'au téléchargement illégal sur Internet.

À Paris, le 28 janvier. Le masque de Guy Fawkes, emblème des Anonymous, est devenu plus largement le symbole de la lutte pour les libertés sur Internet. Photo mafate69 CC BY SA

Depuis la signature du traité, les lobbys de la propriété intellectuelle ont encore intensifié leurs pressions sein même du Parlement européen, afin que le texte soit validé avec un minimum de débats. Une situation qui a entrainé la démission de l'eurodéputé français Kader Arif, principal rapporteur d'Acta à Bruxelles, dès le 26 janvier. Ce dernier avait alors dénoncé «l'ensemble du processus qui a conduit à la signature de cet accord: non association de la société civile, manque de transparence depuis le début des négociations, reports successifs de la signature du texte sans qu'aucune explication ne soit donnée, mise à l'écart des revendications du Parlement européen.»

Pour entrer en vigueur dans l'UE, ce texte doit être in fine ratifié par les parlements nationaux. Mais la Pologne, la République tchèque et dernièrement la Lettonie ont déjà gelé ce processus face au mécontentement croissant. «Nous allons attendre que les autres le signent, a déclaré Daiga Grube, porte-parole du ministère letton de l'Economie. Nous l'avons signé, mais nous nous apercevons maintenant que nous avons besoin d'en discuter et nous voulons être sûrs que nous allons mener cette discussion avant de présenter ce document au Parlement.»

Auparavant, l'ambassadrice de Slovénie au Japon, qui a représenté son pays lors de la signature du texte, s'était excusé de sa «négligence civique» sur son blog , estimant que «le traité Acta limite et restreint la liberté d'utiliser le réseau le plus large et le plus important dans l'histoire de l'humanité»

La Slovaquie, qui n'a pas signé l'accord à Tokyo, a de son côté annoncé en début de semaine avoir suspendu les travaux préparatoires sur le sujet.

(Source AFP)

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