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Libération

L’Egypte, entre péchés de chair et charia

par Tania Kahn
publié le 11 décembre 2012 à 10h41
(mis à jour le 11 décembre 2012 à 10h42)

Une scène de foule en Egypte, lors de la révolution. Une tête blonde, occidentale, suffoque, emportée par les remous de cette masse uniforme et pixelisée. C’est un viol collectif, aux abords de la place Tahrir. Changement de décor, la caméra glisse sur cette jolie photo de nu, un autoportrait mis en ligne par une Égyptienne décidée à combattre l’esprit rétrograde et obscurantiste de ses compatriotes salafistes.

Ainsi démarre, pied au plancher, le documentaire au titre aguicheur Sexe, salafistes et printemps arabes réalisé par le reporter Paul Moreira. On n’échappe pas à cette débauche d’images tape-à-l’œil, à ce florilège parfois abrupt, parfois drôle et instructif, de films coquins au parfum oriental. On n’échappe pas non plus au pire : cette scène d’excision d’une petite fille, à la limite du supportable, exhibée à deux reprises, sans ambages.

Cela dit, la violence des images fait écho à la gravité du propos : un état des lieux catastrophique des rapports hommes-femmes en Egypte. La force de Sexe, salafisme et printemps arabes réside dans le fait qu’il est filmé au plus près des témoignages de la jeunesse égyptienne. Le viseur de la caméra s’accroche au voile de ces femmes reléguées au statut de citoyen de seconde zone, coupables d’attiser les irrépressibles pulsions de leurs congénères.

Voilées mais pas muselées, elles tiennent tête à leurs agresseurs et à la police, souvent complice. En 2008, 83% d’entre elles déclaraient avoir été harcelées.

Face caméra, le sexe fort révèle aussi ses faiblesses. De jeunes Egyptiens racontent leur frustration, conséquence directe de l’interdit religieux de toute relation sexuelle avant le mariage. Il n’est pas rare de patienter de très longues années avant de se frotter à l’autre sexe, car pour convoler il faut de l’argent. D’ailleurs, lors de la révolution, les jeunes réclamaient la liberté de pouvoir se marier.

En attendant, «les gens sont morts émotionnellement, ils sont comme des zombies» , résume un témoin égyptien. La prochaine révolution sera peut-être sexuelle.

Rediffusion sur Canal+ décalé :

- dans la nuit de mercredi 12 à jeudi 13 décembre à 3h15

- dans la nuit de samedi 15 à dimanche 16 décembre à 4h40

- dans la nuit de dimanche 16 à lundi 17 décembre à 3h55

Sexe, salafistes et printemps arabes

_ Documentaire de Paul Moreira

_ Rediffusions cette semaine sur Canal+

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