L’expert en profilage gagne le jackpot publicitaire

par Christophe Alix
publié le 10 janvier 2011 à 12h41

Le premier réseau social du Web sera-t-il un jour plus rentable que le leader des moteurs de recherche ? Au vu des résultats provisoires de Facebook en 2010 communiqués par Goldman Sachs, sa rentabilité pourrait dépasser celle de Google, affirment les analystes de Wall Street. «Ce genre d'affaires peut dégager, potentiellement, une marge d'exploitation de 30 à 40%» , avance Lou Kerner, de Wedbush Securities, qui en détient des actions. Selon ses calculs, la valorisation de Facebook pourrait atteindre jusqu'à 200 milliards de dollars (154 milliards d'euros) d'ici 2015. Et dire que jusqu'en 2009 le site, devenu la troisième audience du Web (après Microsoft et Google mais désormais devant Yahoo), ne dégageait pas le moindre dollar de profit !

Comme pour Google, c'est la publicité qui a permis à Facebook de s'imposer en sept petites années d'existence comme la nouvelle cash-machine du Web. Une publicité 100% automatisée, comme chez Google, et qui permet à l'annonceur d'utiliser toute la palette du «profilage» à la mode Facebook pour cibler au plus près sa clientèle. Comme l'expliquaient récemment sur leur blog, Mondaynote , les experts en nouvelles technologies Frédéric Filloux et Jean-Louis Gassée, Facebook offre un «très haut degré de précision» , avec la possibilité de «trouver la femme d'au-delà de 40 ans qui travaille pour IBM dans le nord de l'Etat de New York et de lui délivrer une pub chaque vendredi entre 18 et 22 heures» . Plusieurs milliers d'annonceurs ont rejoint le réseau social dont certains poids lourds, tel le lessivier Procter & Gamble pourtant réputé très conservateur dans ses choix d'investissements publicitaires.

Si les réseaux sociaux comme Facebook sont encore très loin du roi Google en termes de «monétisation» de leur audience, leur potentiel de développement apparaît très important. Rapporté à son audience, Facebook ne dégage que 2 à 3 dollars de revenus publicitaires par membre chaque année, là où Google navigue entre 35 et 40 dollars par usager. Mais le réseau social a des tarifs plus bas et peut se targuer d’un temps de fréquentation moyen très largement supérieur à celui des moteurs de recherche. Alors que Google met en avant la très forte adéquation du message publicitaire avec les thèmes des requêtes de recherche des internautes, Facebook promet une plus grande visibilité aux annonceurs. Même si le «taux de clic» est bien moindre.

Au-delà de ce modèle publicitaire qui permet aux sites à très forte audience d'engranger des recettes considérables, Facebook multiplie les services pour rendre toujours plus captifs ses centaines de millions de membres. Outre une «messagerie sociale» en préparation, le site a lancé Facebook Credits , une monnaie qui permet d'acheter des objets virtuels sur des «jeux sociaux» tel FarmVille auxquels les membres ont accès depuis leur compte Facebook. «A moyen terme, le site pourrait devenir une immense place de marché avec sa propre monnaie, commercialisant des tonnes de services payants» , note Emmanuel Parody, éditeur en France de CBS Interactive. Reste à savoir si Facebook saura garder ses membres et continuer à faire croître sa base de données.

Paru dans Libération du 08/01/2011

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