L’impossible achat d’un portable sans Windows

par Jules le Goff
publié le 21 mars 2008 à 12h21

Dans les amphis, la tendance est aux ordinateurs portables. Quel produit acheter ? Naïvement, je pensais qu’il était possible d’acquérir, séparément, une machine et un système d’exploitation ; choisir entre HP, Dell ou Sony, puis entre Windows Vista, Windows XP, Linux… Je sais que le regroupement de plusieurs produits dans un lot indivisible et ne comportant qu’un prix, cela s’appelle de la vente liée, et que c’est interdit par la loi.

Cette certitude en tête, je me rends à la Fnac, où j’aborde un vendeur et lui signale mon intérêt pour un modèle léger, performant et bon marché.

Les choses se corsent quand je lui explique que je possède une licence compatible et que je ne vois pas pourquoi je devrais en acheter une autre. Le ton se fait plus sec : «Impossible. Les portables sont livrés avec Vista.» Je fais mine de ne pas comprendre : «Je ne peux pas acheter seulement l'ordinateur ?» Agacement. Aux grands maux les grands remèdes : «Je ne sais pas si vous le savez, mais cela s'appelle de la vente liée, c'est illégal. On ne peut rien faire ?» Embêté, le vendeur me signale que «Microsoft passe des accords préférentiels avec les constructeurs» , qu'il faudrait voir avec la direction des produits, mais que, là, le magasin va fermer. Je continue à le titiller. «A mon avis, beaucoup ont essayé de se faire rembourser et se sont cassé les dents. Ils ont de gros services juridiques. Mais sur le plan éthique, je suis d'accord avec vous, c'est déplorable.» Déterminé, je me rends chez Surcouf, car je sais qu'on y vend des portables «à la carte». Même jeu, même mine souriante du vendeur... jusqu'à ce que je lui dise que je veux bien acheter son modèle, mais pas Windows. Tous ont Windows Vista installé et verrouillé, d'après lui. «Et si je veux un portable sans système d'exploitation ?» «Il faut voir en haut. Mais c'est plus cher.» Le même produit, sans système d'exploitation, plus cher ? «C'est à la carte, alors c'est plus cher.» Un technicien consent à me répondre. Il me désigne un modèle, dans la même gamme de prix, mais… sans marque. «Si vous voulez de la marque, il faut prendre Vista.» Je lui demande si c'est moins cher si je monte l'ordinateur moi-même. «Vous gagnez 50 €.» Une misère. Le vendeur, décidément peu aimable, semble de moins en moins disposé à la conversation. Dernière chance, les magasins spécialisés de la rue Montgallet ( Lire l'article ). Mais, là aussi, les réponses sont négatives. «Tous les portables sont livrés avec Vista. On ne vend qu'avec la licence. Ça vient de l'usine, c'est déjà monté. Ça se fait peut-être, mais on ne sait pas où.» Ici, on m'explique que les portables se montent moins facilement que les ordinateurs de bureau. Ailleurs, on me propose de revendre ma licence. Ce qui est illégal... mais, après tout, certains s'accommodent fort bien de l'illégalité.

Le mot de la fin est pour un vendeur, plus lucide que les autres : «Si les accords entre Microsoft et les fabricants n'existaient pas, ils vendraient beaucoup moins de Windows.» Effrayant de logique. Mon conseil pour ceux qui refusent ce diktat : allez sur Internet, sur les forums d'entraide, puis achetez en ligne.

Libération a confié son édition du 21 mars aux étudiants de Nanterre. Jules Le Goff est étudiant en master 1 d'économie.

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