La 3G montre ses limites

par Gregory Rozieres
publié le 2 juillet 2010 à 10h21
(mis à jour le 2 juillet 2010 à 10h28)

Le marché du smartphone décolle en France, avec une augmentation de 143% en 2010 par rapport à l'année dernière d'après une étude de GfK. Et avec cette augmentation, la grande question est de savoir si les opérateurs arriveront à fournir un accès 3G de bonne qualité à leurs abonnés. Aujourd'hui, UFC Que Choisir a justement publié une étude ( PDF ) réalisée auprès d'utilisateurs de smartphone et disposant d'une connexion 3G ou 3G+. Les résultats sont loin d'être convaincants.

Environ 40% des usagers ne sont pas satisfaits de leur connexion, principalement car ceux-ci ne captent pas (ou mal) la 3G dans des zones pourtant couvertes par le réseau. Ainsi, 60% des mobinautes insatisfaits de leur forfait ne disposent pas de la 3G. SFR décroche la palme d'or avec 48% des utilisateurs non-satisfaits. Au niveau des usages «classiques» des smartphones, les sondés sont en général satisfaits. Seuls 24% ne sont pas satisfaits du service d'email et 25% pour les sites internet adaptés aux smartphones. Ce taux monte à 60% pour les sites web qui ne sont pas adaptés au mobile, car ceux-ci demandent un temps de chargement plus long et ne sont pas simples à utiliser sur un petit écran.

L'utilisation d'application en rapport avec des sites web est plutôt bien perçue, avec 58% de satisfaits, alors que bizarrement, 28% des sondés ne se prononcent pas sur les applications de réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter (contre seulement 9% pour les applications de sites web en général). Le questionnaire précisait pour chaque question (en dehors de la qualité de la connexion) que les sondés devaient répondre dans le cadre d'une utilisation optimale de leur smartphone, c'est-à-dire avec une connexion 3G effective.

En dehors de ces statistiques, les commentaires des personnes interrogées sont aussi très intéressants, note l'étude. Sur les 2 107 participants, 766 ont ajouté un commentaire libre par rapport à leur retour d'expérience. 20% des commentaires comportent une référence au manque de couverture du réseau 3G, alors que les opérateurs mobiles affirment couvrir entre 80 et 90% de la population. L'étude avait aussi posé une question ouverte à propos du débit de la connexion 3G. Et là, stupeur. Sur les 492 personnes qui ont effectué un test de connexion, 59 % des consommateurs ont un débit inférieur à 1000Kb/s, dont 45% avec un débit inférieur à 500 Kb/s. De plus, moins de 6% des personnes affirment avoir un débit supérieur à 3 000 Kb/s, alors même que la 3G+ permet en théorie une connexion atteignant les 7.2 Mb/s.

Enfin, un des problèmes souvent relevé par les utilisateurs dans leurs commentaires concerne le bridage imposé par les opérateurs. Le fameux «illimité» prôné dans les forfaits n'est pas au rendez-vous, avec des limitations comprises entre 500 Mo et 2Go de données téléchargeable par mois. Au delà de ce seuil, la connexion est bridée. De même, les sondés regrettent le fait que les opérateurs affirment proposer «internet» en illimité alors que de nombreux services ne sont pas disponibles, comme la VoIP, le P2P ou encore les mails (dans les forfaits bas de gamme).

Saturation du réseau ?

Concernant ces derniers points, les opérateurs affirment que ces bridages sont mis en place pour le bien des internautes : le réseau mobile est sur le point d'être saturé, affirment-ils. Pour éviter cette hypothétique catastrophe, les opérateurs mettent donc en place des restrictions. Exemple : aux Etats-Unis et en Angleterre, les opérateurs AT&T; et O2 qui proposaient des forfaits totalement illimité ont commencé à imposer des bridages en terme de data (500Mo par mois par exemple, avec des recharges unitaires à acheter). Il faut dire que lesdits opérateurs possèdent, dans leur pays respectifs, le monopole de la distribution des produits Apple et donc de l'iPhone mais surtout de l'iPad, qui consommerait 10 fois plus de bande passante. N'ayez crainte, les français semblent mieux préparés que les anglo-saxons et ne devraient pas voir leur réseau saturé pour le moment.

Même s'il est normal pour les consommateurs de demander un accès total et sans limite, il faut noter que l'utilisation de la bande passante est très, très hétérogène. AT&T; affirme par exemple que seuls 2% des utilisateurs dépassent les 200Mo de data téléchargées par mois sur un smartphone. Et ce serait ces 2% qui monopoliseraient 40% du réseau. Il ne reste donc qu'à attendre la 4G pour enfin avoir un internet vraiment illimité ? Même pas sûr. Xavier Niel, dans une interview accordée à l'ARCEP et diffusée sur universfreebox, affirme que l'accès en illimité au data offert par les opérateurs mondiaux était une erreur. «Sur le marché français, on a offert la data - chère à produire - et on a vendu cher la voix - gratuite à produire -, ce qui est catastrophique. Un beau matin, les opérateurs mobiles devront revenir en arrière» , affirme le PDG d'Illiad/Free, qui sera donc le patron de la 4e licence mobile en 2011. Plusieurs solutions seraient possibles pour désengorger le réseau (même si celui-ci n'est pas près de saturer tout de suite), comme par exemple utiliser les bornes Wi-Fi des FAI.

Il n'empêche. Malgré cette éventuelle saturation du réseau, la moindre des choses serait d'informer le consommateur des véritables limites et possibilités des forfaits mobiles à sa disposition. L'étude d'UFC Que Choisir se conclut ainsi sur trois requêtes à destination des opérateurs. «I. N'utiliser le terme « Internet » que pour désigner un accès universel à tous les contenus disponibles sur le Web ainsi qu'à tous les protocoles et technologies qui lui sont liés. "II. Ne plus qualifier d'« illimitées » des offres soumises à un quota de données échangeables. III. De plus, l'opérateur doit fournir une information claire et précise s'agissant de la qualité de service fournie (vitesse, couverture, saturation des réseaux, etc.)» . Tout est dit.

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