La Freebox au tribunal

par Sébastien Delahaye
publié le 26 novembre 2008 à 15h57

L'affaire traînait depuis deux ans, mais cette fois, ça y est: trois développeurs de logiciels libres ont assigné Iliad , la maison-mère du fournisseur d'accès Free, au Tribunal de Grande Instance de Paris pour non-respect de la licence GNU/GPL. Au cœur du problème, on trouve la Freebox, le boîtier de connexion réseau fourni par Free à ses abonnés, qui fonctionne grâce à des logiciels libres (dont GNU/Linux en premier lieu). La licence GPL, utilisée dans la plupart de ces logiciels, oblige à publier toute modification du code source des applications distribuées. En d'autres termes, Free, qui a modifié certains des logiciels qu'il utilise dans la Freebox, doit rendre publiques ses modifications. Or, Iliad s'y refuse depuis toujours.

Après plusieurs demandes plus ou moins amicales, et une mise en demeure il y a un an, Harald Welte, développeur d'Iptables, et Erik Andersen et Rob Landley, développeurs de Busybox (les deux logiciels sont utilisés dans la Freebox), se sont résolus à passer au tribunal. Et là, en plus des réclamations d'origine (la publication du code source des modifications et une liste des logiciels utilisés): les trois développeurs demandent 10000 euros chacun, et surtout 1 euro de dédommagement par Freebox. Si le TGI de Paris suivait les demandes des plaignants, la facture se monterait alors à plusieurs millions d'euros pour Iliad.

La défense de Free n'a pas changé depuis le début: le fournisseur d'accès estime rester propriétaire des Freebox qu'il fournit à ses clients. Autrement dit, la Freebox, et les logiciels qu'elle contient, ne sort jamais du réseau privé de Free. Pour le FAI, cela signifie qu'il n'y a pas de distribution des logiciels, et donc pas d'obligation de redistribution des sources. Cette interprétation de la GPL n'est évidemment pas partagée par les développeurs, qui estiment que Free «viole leur droit moral» , ni par la Free Software Foundation France, une association qui promeut le logiciel libre en France, et qui a largement contribué à rendre possible l'assignation en justice: elle a donné 10000€ lors d'un appel à donations lancé par les trois développeurs il y a un an. Les plaignants s'attendent à ce que l'affaire dure «des mois ou des années» .

Les trois plaignants n'en sont d'ailleurs pas à leur coup d'essai: Erik Andersen et Rob Landley ont déjà gagné quatre procès de ce genre à New-York, et Harald Welte a créé le site gpl-violations.org pour suivre les procès en rapport avec le logiciel libre. Pour Free, la diffusion de ses codes sources pourrait être un sujet sensible. L'entreprise avait été la première, avec la Freebox, à fournir son propre boîtier réseau avec des fonctionnalités logicielles développées en interne.

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