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Analyse

La pub s’éteint, France Télévisions s’alarme

Télé. Les nouveaux horaires du service public sont entrés en vigueur hier à 20 heures, sur fond de grève à France 3.
par Raphaël GARRIGOS et Isabelle ROBERTS
publié le 6 janvier 2009 à 6h51
(mis à jour le 6 janvier 2009 à 6h51)

On retiendra du jour de l’extinction de la pub après 20 heures sur France Télévisions que la dernière réclame, diffusée quelques instants avant l’heure fatidique sur France 3, vantait le yaourt Danacol. Réduire son cholestérol, si c’est pas service public, ça… De son côté, France 2 a pris le nouveau pli un peu plus tôt, avec un JT démarré dès 19 h 58, histoire de tenir les horaires pour démarrer le prime-time à 20 h 35.

Ficelle. A 20 h 10, sur France 3, surprise : les deux andouilles du 118 218, suivis de la mutuelle MMA. On nous aurait menti ? Meunon, il s'agit des deux écrans de parrainage de Plus belle la vie, toujours autorisés. Depuis vendredi, le soap marseillais nous tenait en haleine : Roland, le sympathique patron du Mistral, s'est fait plomber. Une ficelle pour scotcher le téléspectateur au nouvel horaire de la série.

France 2, 20 h 21 : une réclame ! Oui, au sein du sujet consacré à la suppression de la pub, un journaliste a glissé à titre d'illustration une pub pour un camembert. Facétieux, le journaliste : «Mon camembert, c'est Président», dit le slogan en forme de gros clin d'œil à l'initiateur de ce bouleversement, Nicolas Sarkozy.

A 20 h 30 pile, le JT de la Deux se termine. Deux bandes-annonce plus tard, voilà un programme court sponsorisé par le voyagiste Jet Tours. Au même moment sur France 3, quelques secondes en forme d'interlude : un homme poussant des bagages sur un lac gelé rêvasse et une voix dit : «France 3». Concept. Nouvelles autopromos sur la Deux et c'est la météo, toujours sponsorisée par Darty. Et illico après, à 20 h 35 et quelques secondes, la soirée télé démarre, dix minutes avant M6. Sur TF1, où on claironnait ne rien vouloir changer à ses habitudes, le JT s'est terminé très vite, à 20 h 32, et le téléfilm a commencé plus tôt que prévu, à 20 h 48. Voilà pour les premières minutes de l'après-pub. Qui revient chaque matin à 6 heures.

«2009, c'est l'année de tous les combats.» Ainsi s'est entamée, lors d'une AG à France 3, cette première journée marquée par une grosse grève qui a sacrément perturbé les éditions nationales et régionales : pas de 12/14, de 19/20- remplacés par un pauvre tout en images - ni de Soir 3. De même, pas de Ce Soir (ou jamais !) mais une pièce de théâtre intitulée - on ne rit pas - Une heure et demie de retard.

C'est la réorganisation du 19/20 qui met les salariés en pétard : afin de caser le plus de pub possible avant 20 heures, la rediffusion de l'édition locale à 19 h 57 a été supprimée. Et la grève va se poursuivre aujourd'hui encore, ainsi que demain à France 2 cette fois, en plus de France 3, en attendant une nouvelle journée d'action lundi. C'est dire l'inquiétude des salariés alors que doit s'entamer, avec la transformation de France Télévisions en une entreprise unique, la renégociation des conventions collectives afin qu'un journaliste de l'édition Euskal Herry Pays Basque ait le même statut - et le même salaire - qu'un confrère de la rédaction de France 2. Un chantier des plus coton.

Slogan. En attendant de se transporter dès demain au Sénat pour une session qui promet d'être tendue, vu que l'UMP ne dispose pas de majorité (lire page 13), le débat sur France Télévisions a agité le personnel politique. On a entendu des noms d'oiseau venus du Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon qui prédit «sur toutes les chaînes, "Télé-Sarkozy à la une tous les soirs"». Chez les Verts, on a trouvé un nouveau slogan : «La télé publique a été libérée de la pub, libérons-là de Sarkozy.» A droite, le Parti radical de Jean-Louis Borloo s'est dit opposé à toute hausse «brutale» de la redevance que les sénateurs pourraient être enclins d'explorer. Le PS, lui, par la voix de son porte-parole Benoît Hamon, a dénoncé dans la suppression de la pub le «maquillage d'un démantèlement du service public». A l'UMP, bien sûr, on a salué un «grand jour». Las, lors du point de presse du parti sarkozyste, la porte-parole Chantal Brunel s'est fait remarquer par un joli lapsus en vantant «la suppression de la télévision sur les chaînes publiques». Boulette. Ou pas.

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