La recette miracle d’Apple : beaucoup d’applications

Horaires de ciné, guide de voyage, ou jeux vidéo… Les petits logiciels destinés à l’iPhone ont frôlé le milliard de téléchargements en 2008. Jackpot.
par Christophe Alix
publié le 12 avril 2009 à 8h30

Un dictionnaire français-mandarin, un guide de premiers secours pour chien accidenté, le plan de métro interactif de Paris, la liste des horaires des vols dans le monde entier… Du plus futile au très utile, du divertissement à l'information professionnelle, ce sont là quelques-unes des 25 000 applications déjà disponibles sur l'AppStore, le magasin de téléchargement créé par Apple pour alimenter en contenus les 30 millions de possesseurs d'iPhone et d'iPod Touch. Cet inventaire à la Prévert, qui grossit au rythme de plusieurs centaines de nouveautés par semaine, est la dernière success story de l'économie numérique, un de ces engouements «comme on n'en a plus connu depuis la bulle Internet» va jusqu'à affirmer un spécialiste du capital-risque de la Silicon Valley. Déjà éprouvé avec la plateforme de téléchargement légal iTunes, ce modèle de commercialisation dématérialisée connaît un essor spectaculaire dont témoigne l'actuel déluge de minilogiciels.

La firme de Steve Jobs, qui reste à ce jour la seule à avoir fait rimer Internet et modèle payant, a mis au point un redoutable écosystème propriétaire qui lui aura permis d’atteindre en moins d’un an plus de 928 millions de téléchargements sur sa nouvelle plateforme ! Une véritable cash machine puisque ce marché encore émergent des applications pour téléphones mobiles est déjà devenu sa principale source de revenus hors ventes de matériel : au dernier trimestre 2008, sur les 303 millions de dollars (230 millions d’euros) de recettes de l’activité musique et ventes associées, les deux tiers provenaient de l’AppStore. Si la dynamique se maintient, cette plateforme pourrait lui rapporter entre 800 millions et 1,2 milliard de dollars dès cette année, estime le courtier Piper Jaffray. Et ce n’est qu’un début.

Comme toujours avec Apple, le modèle est d’une grande simplicité. En échange d’un environnement technologique très riche et d’une visibilité immédiate pour les développeurs de ces applications, Apple prélève 30 % des revenus générés par la vente de ces programmes quand ces derniers sont payants - au moins un quart des applications sont gratuites. Dans ce dernier cas, les développeurs n’ont qu’à s’acquitter de la somme de 69 euros pour accéder au «SDK», la plateforme de développement d’Apple.

Lancé en juillet 2008, l'AppStore et son interface conviviale a vite conquis des bataillons de développeurs de logiciels et de jeux, qui jusque-là avaient toujours ignoré Apple en raison de sa part de marché jugée trop marginale (seulement 5 %) dans les ordinateurs face au PC. «Avec à peine 10 % du marché des smartphones qui ne représente lui-même que 10 % des ventes de mobiles dans le monde, l'iPhone est loin d'avoir conquis le grand public , explique Carolina Milanesi de la société d'études Gartner. Mais ses utilisateurs précoces, à la pointe de la high-tech et au pouvoir d'achat supérieur à la moyenne, inaugurent de nouveaux usages qui vont peu à peu se généraliser. Ils surfent beaucoup sur le Net et consomment depuis leur mobile qui n'a plus de téléphone que le nom.»

Si le magasin virtuel d'Apple remporte un tel succès, c'est aussi en raison de son mode de facturation diaboliquement efficace. Pour activer son iPhone, il faut entrer son numéro de carte de crédit afin de «faciliter» , précise Apple, ses futures emplettes sur iTunes et l'AppStore. A raison de quelques dizaines de centimes l'application (un tiers coûte moins de un euro et elles dépassent rarement les 10 euros), l'habitude est vite prise de picorer dans les rayonnages numériques à coups de micropaiements. «C'est terrible, on consomme sans s'en rendre compte , note un utilisateur qui se limite à un budget mensuel d'une dizaine d'euros. On achète à l'impulsion ou en situation, lorsque l'on a besoin de quelque chose et c'est souvent tentant parce qu'il existe des applications pour tout et n'importe quoi.»

Dans la nouvelle version de l’AppStore qui sortira en juillet, Apple pousse plus loin encore le raffinement de son marketing mobile. Il sera possible de payer différents prix selon le niveau de sophistication du programme. Les éditeurs de jeux, qui fournissent les deux tiers des applications, pourront ainsi proposer des niveaux supplémentaires. Tout bénéfice pour Apple, comme l’arrivée de formules par abonnement qui intéressent des éditeurs de presse en quête d’un modèle «micropayant» pour leurs versions numériques.

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