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Libération

La redevance télé va-t-elle monter d'un écran ?

par Sophian Fanen
publié le 2 juillet 2012 à 18h36
(mis à jour le 2 juillet 2012 à 19h30)

L'idée date de quelques années déjà, elle avait même déjà été formulée par la droite sous la forme d'un amendement à la loi de finance 2011 finalement évacué. Samedi, la ministre de la Culture Aurélie Filippetti a de nouveau évoqué sur RTL l'hypothèse d'une contribution à l'audiovisuel public (le nom officiel de la redevance) étendue aux autres écrans (ordinateur, tablette, smartphone...) pour les foyers qui ne sont pas équipés de téléviseurs.

Aujourd'hui, le cabinet de la ministre démine mollement, rappelant qu'il ne s'agit que d'une «piste de réflexion parmi d'autres» . Mais une piste à explorer urgemment, afin de sécuriser le financement de l'audiovisuel public dans le cas (probable) où Bruxelles retoquerait la taxe sur les fournisseurs d'accès à Internet créée pour compenser en partie l'arrêt de la publicité sur les chaînes de France Télévisions avant 20h.

Il faut dans ce cadre trouver un milliard d'euros, et le rapprochement technologique de la télévision et des autres écrans fait de l'extension de la redevance audiovisuelle une évolution assez logique pour le monde politique. «Avec la télé connectée, la télévision va passer de plus en plus par les ordinateurs, est-ce qu'il faut étendre la redevance à ces écrans quand on n'a pas de téléviseur? Ce sera dans le cadre du débat pour 2013» , a précisé Aurélie Filippetti.

Interrogé par Ecrans.fr sur le sujet, Bernard Héger, délégue général du Simavelec (le Syndicat des industries de matériels audiovisuels électroniques, qui représente les grandes marques du secteur), estime qu'il s'agirait d'une réforme «logique» et d'une question de «neutralité technologique» .

«On assiste aujourd'hui à une jonction du broadband (Internet) et du broadcast (la télévision), dit-il encore. Les nouveaux modèles de téléviseurs permettent de regarder la télé et donc les chaînes du service public, d'écouter la radio et donc également les chaînes du service public, mais aussi d'utiliser Skype, Google ou des jeux en ligne. De l'autre côté, on peut accéder à toute la télévision par Internet avec n'importe quelle machine connectée. Il y a donc une certaine logique à imposer à ces technologies similaires une régulation similaire. L'idée est bien acceptée aujourd'hui, mais politiquement c'est une autre affaire.»

Le Simavelec estime qu'il y a aujourd'hui quelque 50 millions de téléviseurs en France pour 26 millions de foyers 26,6 millions en 2008 [selon l'Ined , ndlr], mais que seuls «1% des foyers sont équipés d'un ordinateur sans avoir de poste de télévision. Il s'agit de petits ménages, des personnes seules ou des étudiants. Ce pourcentage peut évoluer vite dans les années à venir, vers les tablettes par exemple. Mais on possédera plutôt une télé et une tablette qu'une unique tablette» , estime Bernard Héger.

Le gouvernement avance pour sa part le chiffre de 3% de foyers français équipés d'un ordinateur mais pas de télévision. En faisant une moyenne à 2% et en comptant une redevance maximale de 125 euros par foyer, sans les diverses exonérations allouées aux personnes âgées ou aux habitants de la France d'outre-mer, l'extension de la redevance audiovisuelle permettrait de ramener au mieux dans les caisses de l'Etat quelque 66,5 millions d'euros. Certaines sources avaient ce week-end estimé ce surplus à 50 millions d'euros. S'y ajouterait une demi redevance à nouveau évoquée pour les résidences secondaires.

La «piste» de la redevance étendue sera discutée lors de la «concertation» qui doit être menée par la commission présidée par Pierre Lescure, dont on attend toujours le lancement officiel. En 2011, François Baroin, alors ministre du Budget dans le gouvernement Fillon, avait estimé que «l'extension [de la redevance] à tous les supports» n'était «pas souhaitable» . Économiquement ou politiquement?

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