La vidéo subit l'avance rapide du marché

par Bruno Icher
publié le 26 octobre 2007 à 1h06

Le marché de l'édition vidéo est en baisse depuis deux ans en France. Difficile à croire lorsqu'à l'approche de Noël, on assiste à l'édification de pyramides de coffrets DVD dans tous les magasins, mais c'est un fait. Après un léger repli en 2005 (pour la première fois depuis 1986), la baisse pour 2006 était, en volume, de l'ordre de 9 %. Paradoxe ? Pas vraiment, selon le Syndicat de l'édition vidéo numérique qui montre du doigt le téléchargement illégal.

De fait, une étude de l'Alpa (Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle) publiée cette semaine, avance que 37,7 % des films américains sont disponibles sur le net avant même leur sortie en salles en France.

Délai. Autre difficulté pointée par le SEVN : le délai séparant la sortie en salles d'un film et son exploitation en DVD. «Nous avons demandé à plusieurs reprises que ce délai de six mois soit raccourci, rappelle Jean-Yves Mirski, délégué général du SEVN. Dans la mesure où, en moyenne, 80 % du total des entrées est atteint après quatre semaines d'exploitation en salles, un raccourcissement de ce délai à quatre mois ne porterait pas préjudice aux films. De plus, la France reste une exception. La plupart des autres pays ont ramené ce délai à trois ou quatre mois.»

Ce raccourcissement, à condition qu'il soit entériné, suffirait-il à endiguer le problème? «C'est en tout cas le moment de se poser la question, reprend Jean-Yves Mirski. Il y a une réflexion globale, actuellement, sur la chronologie des médias et sur la construction de modèles de l'offre légale, notamment dans le cadre de la commission Olivennes (1). Et puis c'est aussi l'occasion d'observer les évolutions du marché. Or, un constat s'impose : tout s'accélère. La durée de vie des DVD se raccourcit, tout comme celle des films en salles, et c'est un phénomène qui existe depuis longtemps, avant même l'essor de l'industrie de la vidéo.»

Tous les éditeurs ont pris la mesure de cette accélération, majors en tête, avec des campagnes de promotion très agressives. Ce qui rend le statut des éditeurs plus modestes nettement plus inconfortables. «Tout le monde fait la même chose reconnaît Manuel Chiche, patron de Wild Side Vidéo. Sans même parler des blockbusters, pour les films de gamme intermédiaire qui réalisent entre 300 000 et 800 000 entrées en salles, la communication est concentrée sur la semaine précédente et celle suivant la sortie et cela essentiellement à la télévision. Pour être sûr de taper au bon moment.»

«Trop gâtés». Dans les mois qui viennent, l'installation de la haute définition (HD) et de la VoD (vidéo à la demande) risquent de modifier encore le marché du DVD. D'autant que la VoD n'a pas de contraintes de délai comme le DVD. «Il nous semble que l'offre VoD concerne majoritairement les émissions de télé, et sera donc complémentaire à l'offre du DVD, dit Mirski. Pour la HD, 10 % des foyers français sont actuellement équipés mais cela représente clairement l'avenir de notre industrie.»

Sauf que cette évolution à grande vitesse représente un risque pour les éditeurs. «Il devient de plus en plus difficile de faire des choix, reprend Manuel Chiche. Quels risques financiers peut-on prendre pour restaurer des films d'auteurs peu connus ? Quelle offre doit-on proposer au juste ? Sur le Net, des consommateurs nous disent qu'ils ne veulent que le film, et pas les bonus qu'ils ne regardent même pas ! On nous disait le contraire il y a trois ou quatre ans. Peut-être aussi que les consommateurs français ont été un peu trop gâtés.»

(1) Lire aussi page 18.

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