«Le CSA préserve l’intérêt de certains»

par Raphaël GARRIGOS et Isabelle ROBERTS
publié le 14 septembre 2011 à 11h34

Jean-Paul Baudecroux, 65 ans, patron du groupe radiophonique NRJ, a fait partie, en lançant la chaîne NRJ 12 en 2005, des nouveaux venus dans le paysage audiovisuel. Une espèce aujourd’hui en voie de disparition.

Votre réaction au rapport de Michel Boyon, qui préconise l’adoption d’une nouvelle norme, le DVB-T2 ?

_ Je pense qu’il y a une vraie volonté de geler le paysage au détriment de la loi et du pluralisme, et au bénéfice des acteurs historiques. On va demander aux téléspectateurs de s’équiper pour le DVB-T2 alors que, dans quatre ans, une nouvelle norme, le HEVC, qui permet la télé en 3D et la super HD, va tout balayer !

Vous reprochez au CSA de ne pas vous attribuer d’autres fréquences…

_ C’est décevant de voir que le régulateur, chargé de faire respecter le pluralisme, ne le fait pas et privilégie les acteurs historiques. On laisse dormir des fréquences pour préserver l’intérêt de certains. La suite du scénario est écrite : LCI va passer en gratuit, Paris Première aussi.

Vous accusez donc le CSA d’être inféodé aux chaînes historiques ?

_ A vous d’en tirer les conclusions.

Mais quel pluralisme incarne NRJ 12 ?

_ Celui des opérateurs, d’abord. Ensuite, c’est un pluralisme de production. Nous faisons travailler une centaine de producteurs. Et nous lançons une fiction quotidienne, avec un budget conséquent de 5 millions d’euros.

Pourquoi avez-vous besoin d’une autre chaîne en plus de NRJ 12 ?

_ Notre pérennité est handicapée : comment voulez-vous que nous luttions avec une seule chaîne pour avoir des séries quand d’autres se présentent avec quatre chaînes ? Avec deux chaînes, on peut peser pour l’achat de programmes et pour le marché publicitaire.

Quelle chaîne voulez-vous créer ?

_ Nous avons deux beaux projets : Chérie HD, à destination des femmes, et Nostalgie, une chaîne dédiée au patrimoine. Mes enfants ne savent pas qui est Jean Gabin ! Il y a des millions d’heures de programmes qui dorment : le catalogue de Pathé, celui de Gaumont… Cela s’appelle de l’intérêt national.

Allez-vous vendre NRJ 12 ?

_ Je n’ai jamais fait le commerce de fréquences et je ne vendrai pas NRJ 12, sauf si j’y suis contraint.

Canal+ a-t-il essayé de vous acheter NRJ 12 ?

_ Tout le monde est venu me voir pour racheter aussi bien NRJ 12 que mon groupe.

Et depuis que Canal+ a annoncé le rachat de Direct 8 et Direct Star , votre téléphone sonne ?

_ Oui, bien sûr. Et c’est humain. Ce qui m’insupporte, c’est de voir le régulateur aller contre l’intérêt général.

Paru dans Libération le mardi 13 septembre 2011.

Sur le même sujet :

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_ - Rapport Boyon : l'énorme coup de la norme

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