Le Conseil Constitutionnel reboote les .fr

par François Arias
publié le 8 octobre 2010 à 14h33

Le recours avait été posé en juillet par un certain Mathieu P. et le Conseil Constitutionnel a tranché aujourd'hui : l'article L45 du code des postes et des communications électroniques a été jugé contraire à la constitution. La conséquence ? C'est tout le système d'attribution des noms de domaine en .fr qui vient de passer à la trappe. Une décision qui ne sera appliquée que dans 9 mois, histoire de ne pas trop bouleverser le monde du web français.

Mais derrière cette décision, c'est la question de la place du Net comme composante de la liberté d'expression qui était posée. Et le Conseil réaffirme par exemple l'importance d'Internet : «qu'en l'état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu'à l'importance prise par ces services dans la vie économique et sociale, notamment pour ceux qui exercent leur activité en ligne, l'encadrement, tant pour les particuliers que pour les entreprises, du choix et de l'usage des noms de domaine sur internet affecte les droits de la propriété intellectuelle, la liberté de communication et la liberté d'entreprendre.»

Internet est donc clairement remis en avant comme une des composantes des droits fondamentaux des citoyens. Cédric Manara, professeur de droit à l'EDHEC Business School , a commenté la décision sur le blog de Dalloz : « Par sa décision « Hadopi » du 10 juin 2009 (2009-580), le Conseil constitutionnel avait déjà indiqué que le principe de libre communication implique le droit d'accéder aux services de communication au public en ligne. Il poursuit son assainissement du cyberespace en considérant que les moyens par lesquels on donne accès par exemple à un site web critique, ou l'on propose une offre commerciale en ligne, méritent d'être sauvegardés.»

Ce qui était mis en cause par le requérant, c’est la formulation du texte, ou plutôt son absence. Le texte laissait beaucoup trop de latitude au pouvoir réglementaire.

En clair, les législateurs avaient été un peu feignants en laissant à l'exécutif le soin de concevoir les règles de gestion des noms de domaine. Le Conseil condamne donc ce choix et appelle à la rédaction d'un texte beaucoup plus détaillé.

La décision pourrait toucher indirectement l’AFNIC, l’organisme auquel a été confié la gestion des .fr, en remettant en cause l’appel d’offre qui lui a donné cette position. De plus, même si l'organisation reste en place, elle devrait perdre plusieurs de ses prérogatives. L’État a toutefois jusqu’au 1er juillet 2011 pour fixer un nouveau cadre réglementaire.

Reste que si rien n’est fait d’ici la date fatidique, on risque d'avoir droit à un joli bazar puisqu’il sera impossible d’acheter de nouveaux nom de domaines. De plus n'importe qui pourrait facilement attaquer le mandat de l’AFNIC ou des attributions passées de noms de domaine.

Pour ceux qui voudraient lire la décision dans son intégralité direction le site du Conseil Constitutionnel.

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