Le caneton Bakchich se déchaîne

par Frédérique Roussel
publié le 11 décembre 2007 à 1h58

Lundi matin. Petit noir au bar en face, La Renaissance, Paris XIXe, avant le comité de rédaction hebdomadaire de Bakchich (1) . L'affaire Guillaume Dasquié, le journaliste d'investigation mis en garde à vue, est sur toutes les lèvres, comme la venue de Kadhafi. On râle sur le Journal du dimanche, qui a plagié Bakchich pour la deuxième fois, sans citer ses sources. On commente les seize pages papier sorties vendredi avec une enquête consacrée à Rachida Dati «superstar», sa communication, ses réseaux et ses ambitions. Autour de la table, Nicolas Beau, le directeur de la rédaction, parti fin novembre du Canard enchaîné«pour voir d'autres quartiers que Palais Royal». Et les jeunes Xavier Monnier, le directeur de la publication, et Guillaume Barou, le directeur artistique. Tous deux sont des «historiques» : ils participaient à Gri-Gri international, un journal satirique gabonais, et ont lancé Bakchich avec «trois bouts de ficelle» en mai 2006.

15 m2.A 10 h 30, à une centaine de pas du bar, le comité de rédaction commence. Les locaux (en tout et pour tout une salle de 15 m2) sont prêtés. «Nous avons beaucoup de bonnes fées», répète Nicolas Beau. 200 000 euros viennent ainsi de tomber dans le berceau du titre. Cela va permettre «une tranquillité d'esprit jusqu'en juin». L'homme d'affaires belge Jean-Jacques Coppée a investi 120 000 euros à titre personnel. En dehors de cinq salariés et d'une trentaine de pigistes affichés ou sous pseudo, parce qu'encartés ailleurs, le titre revendique des «compagnons de route» (Philippe Labarde qui rejoint l'équipe en janvier, l'éditeur François Gèze ou l'écrivain Jean Montaldo). «Il existe tout un vivier de journalistes confirmés, qui ont entre 40 et 60 ans, aiment l'enquête et n'ont pas trouvé de place dans la presse», précise Nicolas Beau.

Sans étiquette.Le modèle économique de Bakchich est atypique. Il s'agit à la fois d'un site Internet (gratuit) et, depuis le 2 novembre, d'un hebdomadaire PDF ou papier (payant). Les abonnements, garantis sans pub, sont pour l'instant de 500. Si le site est ouvert à la publicité depuis une quinzaine de jours, il n'est pas près d'en vivre, avec actuellement 20 000 visites quotidiennes en moyenne, soit 400 000 mensuelles (selon Google Analytics). «Il faut atteindre une masse critique», commente Bertrand Rothé, directeur général et enseignant dans son autre vie.

L'information inédite, sans chercher l'exhaustivité : c'est le créneau que revendique Bakchich . «Le futur ambassadeur en Libye, c'est nous ; le rachat de la Tribune par Alain Weill, on était les premiers», rappelle Xavier Monnier. Et selon ses géniteurs, ceux qui associeraient le titre à un Canard enchaîné de la Toile se trompent. La parenté s'arrête au ton caustique et à l'info. Pour le reste, Bakchich se veut très international et refuse toute étiquette.

Quatorze personnes assistent au comité ce matin-là. Bertrand Rothé fait un point d'audience Web : en tête de la fréquentation, le papier sur Rachida Dati, suivi par la vidéo interview de Bernard Kouchner sur la Libye. Après la critique collective du numéro 58, sorti vendredi, la discussion passe sur le menu du Bakchich du 14 décembre : un dossier sur les cantines scolaires à Paris, la baisse d'audience à TF1. Sur un mur s'étale le chemin de fer de l'hebdo papier/PDF. En face, le menu Web. Bakchich compte bien s'épanouir sur le second tout en privilégiant le premier.

www.bakchich.info

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