Facebook : Le Nasdaq se fait sonner les cloches

par Fabrice Rousselot
publié le 18 mai 2012 à 16h30
(mis à jour le 18 mai 2012 à 16h47)

Le jeune patron fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, vient de marquer la fin d'une nuit de «hackathon» (marathon de codage informatique) au siège du groupe, en Californie, en sonnant à distance la cloche du Nasdaq basé à New York.

Entouré de ses plus proches collaborateurs, comme sa directrice d'exploitation Sheryl Sandberg qui lui a donné une longue accolade, et de centaines d'employés de sa société, il a ainsi marqué l'ouverture de la plateforme boursière électronique en l'honneur de la première cotation de son réseau social aux 900 millions d'utilisateurs.

(AFP)

Article paru dans Libération du 18 mai -- de notre correspondant à New York

«On est tous sur les dents, c'est de la folie totale, confie ce directeur d'une banque d'affaires à Chicago. Mais la plupart de mes clients seront heureux ce week-end. Ils seront actionnaires de l'une des entreprises les plus excitantes de la planète.» Cela fait des mois que Wall Street se prépare à ce que certains appellent «le jour F» . Aujourd'hui donc, après un suspense savamment entretenu, le réseau social créé par Mark Zuckerberg entre en Bourse.

L'opération est d'ores et déjà un succès. Facebook va vendre plus d'actions que prévu : 421 millions d'actions au lieu de 337 millions, et même jusqu'à 484 millions en cas de forte demande des investisseurs. Le prix de l'action a lui aussi été relevé. Facebook pourrait lever près de 20 milliards de dollars (16 milliards d'euros), avec une valorisation qui dépasserait les 100 milliards de dollars. «Un chiffre stratosphérique» , comme le relevait hier un analyste. L'introduction en Bourse serait alors la plus grosse jamais réalisée pour une société internet. Et l'une des trois plus importantes dans toute l'histoire américaine.

La cotation, sous le sigle FB, devrait en outre créer instantanément une série de nouveaux multimillionnaires dans la Silicon Valley. Zuckerberg, qui détient 28,4% de sa propre société, va ainsi devenir l'un des dix Américains les plus riches. La ville de Menlo Park, en Californie, où le réseau social vient de s'installer, a même estimé que toute l'affaire allait lui profiter «à hauteur de 25 millions de dollars» , assurant que tous ces «nouveaux riches» allaient investir dans des propriétés immobilières. L'IPO (introduction en bourse) est surtout considérée comme une étape déterminante pour la compagnie qui, en huit ans d'existence, a révolutionné le Web.

Jusque-là, le groupe pouvait opérer sans avoir à divulguer ses résultats financiers, et sans craindre les réactions des marchés. À compter d'aujourd'hui, tout change. Le délire ambiant n'a pas suffi à étouffer les mises en garde, tant sur la capacité de Zuckerberg à faire face à ses nouvelles responsabilités que sur le modèle économique de Facebook. Mercredi, le constructeur automobile General Motors a annoncé qu'il avait décidé de «revoir» son budget publicité sur le réseau social, en précisant que, malgré l'argent investi, les utilisateurs de Facebook ne semblaient pas acheter beaucoup de voitures. Certains estiment déjà que l'entreprise pourrait avoir des difficultés à se réinventer pour attirer les annonceurs, alors que la publicité représente près de 85% de ses recettes. «Facebook est l'une des machines les plus puissantes de la planète , remarquait hier Martin Sorrell, patron de l'agence de publicité WPP. Toutefois, pour l'instant, ce n'est pas une machine publicitaire.»

La question est de savoir si la cotation de Facebook s'avérera un succès magistral à moyen terme ou si l'action peut s'effondrer. «Cela va sûrement être une grande réussite dans les premiers jours , estime Craig Forman, partenaire d'une firme d'investissement, après cela se calmera un peu forcément. Mais on peut penser que sur le long terme, les réseaux sociaux vont créer de la valeur pour les investisseurs et représenteront un secteur très solide.»

Paru dans Libération du 18 mai 2012

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