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Le vinyle total plugué

Avec les platines numériques, le microsillon se découvre une nouvelle jeunesse. Entre nostalgiques et geeks.
par Astrid GIRARDEAU
publié le 14 décembre 2009 à 11h13

LLe CD est mort, vive le disque vinyle ! En pleine ère numérique, le microsillon fait un retour en force. Face à la froideur immatérielle du MP3, ce bel objet au son imparfait a reconquis la fibre nostalgico-régressive des trentenaires et séduit les plus jeunes via l’electro ou la musique à papa. Un phénomène de mode qui tend à s’installer. La vente de vinyles est en hausse constante (1), les boutiques de disques continuent de fleurir et l’offre de platines vinyle numériques, à connecter via un port USB, explose.

A son lancement, en 2005, le tourne-disque iTTUSB d'Ion est classé dans la rubrique «Insolite» des magazines. Aujourd'hui la marque propose une dizaine de modèles qui permettent de numériser ses 33, 45 et 78 tours vers une multitude de supports. Un ordinateur bien sûr, mais aussi directement vers une clé USB, une carte mémoire SD, un disque dur externe ou encore un iPod. «On en vend entre 40 000 et 50 000 par an en France , indique Philippe Lecomte, directeur du marketing d'Ion. C'est à la fois un marché de renouvellement et d'équipement. Cela intéresse les gens qui ont gardé beaucoup de disques chez eux, mais parfois n'ont même plus de platine. Et la nouvelle génération qui découvre le vinyle, notamment via les DJ.»

Depuis, nombre de constructeurs, dont certains n’ont d’ailleurs jamais fait dans la platine classique, ont rejoint le marché. Vendus entre 100 et 600 euros, ces objets ont l’avantage d’être d’une grande facilité d’utilisation. Les plus simples se résument à connecter le support (par exemple la clé USB) à la machine, lancer le vinyle et appuyer sur le bouton d’enregistrement. Les autres demandent l’installation d’un pilote.

Généralement quelques réglages basiques suffisent avant de démarrer la numérisation. Pour les perfectionnistes, des logiciels permettent ensuite de nettoyer le bruit, retravailler le son et ajouter des effets.

La compression varie énormément d'un produit à l'autre. Si certaines platines offrent un large choix de formats (MP3, wav, aac, ogg, flac, etc.), d'autres, comme la dernière Denon , sont limitées à une conversion en MP3 à 192 kps.

«Ce sont des produits grand public, pas pour les mélomanes» , indique Patrick Hellio, journaliste pour le site Ere numérique . Surtout, entre «celles en plastique dont le coffre ne permet pas d'absorber les vibrations» et des «finitions pas belles» , il déplore une «qualité de fabrication moyenne» pour un prix pas si donné. Qu'en pensent de leur côté les vendeurs de galettes ? «Du bien , répond Slimene Ounich de la boutique parisienne Music Please Record Shop. On pouvait déjà numériser les vinyles, notamment grâce à des boîtiers de conversion, mais cela a l'avantage d'offrir un produit tout en un.»

La platine USB, cadeau rétro-geek de Noël 2009 ? «On prévoit beaucoup d'achats , confie Philippe Lecomte, d'Ion. Les tarifs ne sont pas énormes. Et, avec le vinyle, on touche au domaine de l'humain, de l'émotif.»

A imaginer la tête de Tatie (à l’idée de ressortir ses cartons de A-ha, Jean-Pierre Mader et Wham) et celle de Kevin (courant sur eBay enchérir sur «Lot de six 33 tours Kiss»), on se dit qu’effectivement, il y a peu de chose qui puisse séduire un si large public.

Qui a dit une boîte de Pyrénéens ?

(1) Selon Nielsen Soundscan, 2,5 millions d’unités devraient être vendues en 2009 aux Etats-Unis (contre 1,88 million en 2008 et 990 000 en 2007).

Paru dans Libération le 21 novembre 2009

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