Léger lifting pour Création et Internet

par Astrid GIRARDEAU
publié le 19 février 2009 à 18h29
(mis à jour le 19 février 2009 à 21h24)

En attendant le rapport de Franck Riester qui devrait paraitre demain, la Commission des Lois a mis en ligne les débats qui ont eu lieu hier, mercredi 18 février, entre les députés autour des articles du projet de loi Création et Internet.

Parmi les principales nouveautés apportées, il y a l'allongement de la durée minimale de suspension de l'abonnement à Internet, qui interviendra lors de la troisième phase dite administrative, après l'envoi des deux messages d'avertissement. Elle passe ainsi de un mois à deux mois. Par contre, dans la deuxième phase, dite transactionnelle, elle est toujours d'un mois. Pour le rapporteur, il s'agit justement de restaurer «un différentiel» entre les deux phases et inciter ainsi les «pirates» «à l'engagement volontaire à ne plus réitérer de tels actes.»

La Commission a également adopté un amendement « précisant les consultations auxquelles l'HADOPI devra procéder avant de rendre officielles les spécifications fonctionnelles des moyens de sécurisation et supprimant l'établissement d'une liste officielle de ces spécifications» . Par contre, elle a rejeté la proposition de Jean Dionis du Séjour que ces moyens de sécurisation soient «interopérables» et «mis à la disposition des consommateurs gratuitement» . La Commission s'est dite aussi favorable à un article additionnel du rapporteur «simplifiant les procédures de contrôle par les services de l'État des logiciels intégrant des mesures techniques permettant le contrôle à distance de fonctionnalités ou l'accès à des données personnelles.»

La plupart des amendements déposés par les députés socialistes ont sans surprise été rejetés. Par exemple, le fait d'étendre le régime de la rémunération pour copie privée aux magnétoscopes numériques. Cette proposition, du député Patrick Bloche, vise à légaliser les services d'enregistrement en ligne type Wizzgo ( lire l'article ). «Les conséquences économiques d'une extension du périmètre de la copie privée seraient très importantes et néfastes pour d'autres secteurs, tels que la télévision de rattrapage ou la vidéo à la demande» , a estimé pour sa part Franck Riester.

Jean Dionis du Séjour lui s'est vu rejeter son amendement permettant de «faire prospérer le "streaming"» en «permettant aux organismes collecteurs de conclure des contrats généraux d'intérêt commun avec les utilisateurs» . Il vise notamment à développer des offres légales et gratuites de type Deezer. «On n'a rien contre ça» , déclarait rapidement Christine Albanel, Ministre de la Culture, lors de son audition mardi dernier . Pourtant, le rapporteur s'est dit défavorable à cette mesure : «pour que ce type d'offre se développe, il faut prioritairement un cadre légal qui empêche le téléchargement illicite.» Aussi, comme on le rapportait ce matin , l'amendement visant à introduire une «contribution créative», sorte de licence légale pour la musique, a été rejeté.

Rejeté aussi, un autre amendement de Bloche prévoyant qu'aucune restriction aux droits fondamentaux et aux libertés des utilisateurs de service de communication ne peut être imposée sans une décision préalable des autorités judiciaires, reprenant donc l'essence de l'Amendement 138 du Paquet Télécom. «Si le juge était saisi d'entrée de jeu, la justice, qui est déjà saturée, serait paralysée !» , a réagi le député UMP Jean-Paul Garraud. Pour sa part, le rapporteur a précisé qu' «il n'est pas prévu que le recours au juge soit automatiquement suspensif afin d'éviter que tous les internautes forment un recours dans le seul but d'engorger la Haute Autorité. Le juge décidera, en référé, si le recours a un caractère suspensif» .

Hier, lors d'un déjeuner avec la presse, le rapporteur déclarait dans une formulation un peu bancale que «l'accès à Internet n'est pas un droit fondamental, plutôt une commodité fondamentale.»

Enfin, on pourra citer le rejet du texte prévoyant qu'un droit d'accès à Internet en haut débit soit garanti à tout citoyen ou de celui précisant que l'HADOPI doit respecter le principe du contradictoire, les droits de la défense ou encore la présomption d'innocence. Même punition pour l'amendement «indiquant que les faits susceptibles de constituer un manquement à l'obligation de surveillance de l'accès à Internet doivent être graves, précis et concordants et démontrer l'intention fautive de l'intéressé» . Riester a en effet rappelé que «le manquement consiste simplement en un défaut de surveillance de l'accès à Internet. La question de l'intention de l'auteur ne se pose donc pas» .

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