Légère baisse pour la Sacem en 2008

par Astrid GIRARDEAU
publié le 23 juin 2009 à 13h29

Hier, lundi 22 juin, la Sacem (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) tenait sa conférence de presse annuelle. Elle a permis d'introduire le nouveau président, Claude Lemesle, qui vient remplacer Laurent Petitgirard. L'occasion également de présenter le rapport annuel de la société de gestion collective pour 2008.

Les temps se sont pas à l'euphorie. Mais les pertes (-0,4% des perceptions) restent relatives pour un secteur dit en pleine crise . «Malgré ce contexte défavorable encore aggravé par les difficultés dues à la crise économique et financière, la Sacem est parvenue à en limiter l'impact puisque les perceptions n'ont subi qu'un léger recul de 0,4% en 2008 et s'établissent à 755,8 millions d'euros» , indique ainsi Bernard Miyet, le président du directoire reconduit, en introduction du rapport annuel. Au niveau des perceptions, la Sacem enregistre une baisse de près de 50 millions d'euros sur les droits phono-vidéo. Celles en provenance d'Internet et du multimédia, bien qu'en hausse constante, restent encore faibles. Selon la Sacem, ce marché n'arrive pas à décoller, du fait «de l'impact du piratage et de la difficulté à consolider des offres par ailleurs de moins en moins rémunératrices pour les créateurs» . On se souvient qu'à propos des 70000 euros reversés par Deezer pour ses six premiers mois d'exercice, la Sacem indiquait : «c'est grotesque, on est dans le micropaiement» .

Origine des droits pour 2008 (Source : Sacem)

Aussi, la Sacem accuse une baisse de la redevance pour copie privée (–4,2 % en 2008). «Cela s'explique principalement par le changement de comportement des consommateurs, qui se tournent vers des appareils à mémoire intégrée dotés d'une forte capacité d'enregistrement, dont la rémunération n'évolue pas proportionnellement à cette dernière, et qui ont un taux de renouvellement plus faible, comme les baladeurs multimédias ou les

disques durs externes , peut-on lire dans le rapport. Le maintien, voire l'extension à d'autres supports, du système de copie privée est une des priorités de la société dans son combat pour la diversité culturelle» . Un appel à la mobilisation pour la copie privée est ainsi lancé autour de l'association La culture avec la copie privée qui groupe 54 organisations du monde de la culture.

Tout au long de ses 36 pages, le rapport revient maintes fois sur la loi Création et Internet. «Sur le plan politique et juridique, l'année 2008 ne nous a pas apporté les solutions ou réponses que nous pouvions espérer en France comme au plan de l'Union européenne, malgré des

efforts constants et la mobilisation de tous les auteurs, compositeurs

et éditeurs, qui ont manifesté une solidarité exemplaire

pour la défense de leurs droits» , estime Bernard Miyet. Plus loin, après un petit rappel historique, notamment la censure de la loi par le Conseil Constitutionnel , on peut lire : «Internet s'est jusqu'ici développé sans que les auteurs perçoivent une rémunération appropriée pour l'utilisation de leurs œuvres. En fonction de cette évaluation, des mesures nouvelles pourront être proposées.» Nul besoin d'une boule de cristal pour savoir que la Sacem va rapidement revenir à l'assaut avec l'idée qu'elle soutient depuis des mois : la taxation des tuyaux. Bernard Miyet a toujours émis des doutes sur la capacité de la loi Création et Internet à compenser les effets de la «piraterie» , et proposé de taxer les fournisseurs d'accès Internet.

La Sacem souhaite également une révision de la loi sur l'économie numérique de 2004 : «il importe de réexaminer les responsabilités juridique et financière des fournisseurs d'accès à Internet, opérateurs télécoms, réseaux sociaux et autres intermédiaires» . Si la Sacem a signé un partenariat avec Dailymotion, ses rapports avec YouTube sont tendus . Ainsi la société de déclarer : «les plateformes Web 2.0 continuent de se réclamer du statut d'hébergeur afin d'échapper à leurs obligations de rémunérer les ayants droit» . Cela fait écho à l'annonce, la semaine dernière, d'une autre société de gestion, la SPPF . Cette dernière a en effet indiqué avoir assigné YouTube devant le Tribunal de grande instance de Paris pour «acte de contrefaçon» pour la diffusion de vidéo-clips non-autorisés sur la plateforme de vidéos en ligne de Google.

Aussi la Sacem se félicite de la collaboration de Free qui a accepté de se joindre aux sociétés d'auteurs (Sacem, Sdrm et Scpp) pour «solliciter conjointement de la justice l'autorisation de suspendre l'accès à 39 newsgroups musicaux utilisés pour l'échange de contenus protégés» . En effet, de nouveaux newsgroups, tel alt.binaries.mp3, ont été rendus inaccessibles durant l'année 2008.

On sait la Sacem accusée de manque de clarté, sur son système de répartition comme sur ses opérations d'investissement financier. Des critiques notamment issues de la Commission de contrôle des SPRD (Sociétés de perception et de répartition des droits). Dans le rapport, sous le titre «Transparence», la société se contente d'expliquer laconiquement que «pour garantir efficacité et transparence, l'ensemble des opérations de gestion effectuées par la Sacem est vérifié à plusieurs niveaux» .

Si inquiétude il y a, le ton général est plutôt à la vigilance et au développement de nouvelles sources financières. Mais ici, la Sacem ne voit qu'à travers son métier, et envisage essentiellement son avenir par l'utilisation accrue de ses répertoires et la taxation. Aucune réflexion sur de nouveaux modèles de diffusion de la musique à l'ère numérique.

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