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Libération

Les experts Copenhague

par Anne-Françoise Hivert
publié le 9 février 2012 à 18h18

Le 1er janvier 2010, un homme, armé d'une hache et d'un couteau, s'introduit chez le caricaturiste danois Kurt Westergaard et tente de le tuer, avant d'être arrêté par la police. Deux jours plus tard, la télévision publique danoise DR diffuse le premier épisode de la nouvelle saison de Livvagterne («les gardes du corps»), enregistrée depuis des semaines : les héros, des agents des services de renseignement, sauvent de la mort un caricaturiste. Coïncidence ? «Le fait que nous soyons toujours si proches de la réalité est une des raisons de notre succès» , affirme Ingolf Gabold, directeur de la fiction chez DR. Chaque semaine, à 20 heures, au moins 1 million de Danois (dans un pays de 5,5 millions d'habitants) se retrouvent devant DR, pour suivre la série du dimanche soir. «Quand nous sommes bons, ils sont 1,7 million» , se vante le directeur. Ce qui équivaut à 60% de parts d'audience… Un succès qui ne s'arrête pas aux frontières du pays. Unit One, Nikolaj et Julie, l'Aigle, Livvagterne … Depuis 2002, DR a raflé quatre Emmy Awards. En 2010, The Killing a été couronné d'un Bafta à Londres.

Les Américains préparent un remake de Borgen . Deux chaînes française et britannique ont racheté les droits de Broen («le pont»), dont l'intrigue se déroulera dans le tunnel sous la Manche. La recette de ce succès ? Dans une pure tradition danoise, les fictions produites par DR suivent «15 dogmes» , raconte Ingolf Gabold. L'un des principaux : «Les écrivains sont les rois et les reines. Ce sont eux qui choisissent le sujet et le format, ce qui est très inhabituel.»

Du coup, l'histoire est au centre de tout : «Elle doit être double. Nos séries doivent fasciner le téléspectateur, en abordant des sujets importants. Mais elles doivent aussi soulever des questions éthiques et psychosociales, qui parlent à tout le monde.» C'est le rôle d'une chaîne de service publique, précise le directeur. Le budget de la fiction sur DR est serré : 13,5 millions d'euros par an, dix fois moins que France 2. Mais les récompenses ont du bon : «Depuis que nous gagnons des Emmy, il est de plus en plus facile de trouver des coproducteurs» , se réjouit Gabold.

Paru dans Libération du 9 février 2012

De notre correspondante en Scandinavie

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