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Libération

Les fournisseurs d'accès veulent faire payer Hadopi

par Virginie Malbos
publié le 12 août 2010 à 16h18
(mis à jour le 12 août 2010 à 17h07)

Quand les fournisseurs d'accès à Internet s'allient, les questions financières ne sont jamais bien loin. La règle s'applique aujourd'hui à Bouygues, Orange, Free et Numericable, qui co-signent une requête adressée au Ministère de la Culture et de la Communication. Datée du 28 juillet, la missive a été publiée ce matin par PC-Inpact et souligne les intentions des quatre FAI vis-à-vis d'Hadopi.

Ceux-ci s'inquiètent d'une déclaration d'Eric Walter, directeur général d'Hadopi, dans les Échos du 15 juillet : «si le gouvernement détermine une compensation et nous alloue les moyens nécessaires, nous la verserons aux FAI, mais aujourd'hui je n'ai aucune information en ce sens et ce n'est pas prévu dans notre budget» . Or en décembre 2000, le Conseil constitutionnel a rappelé à l'État qu'il était obligatoire de compenser les dépenses imposées aux opérateurs privés lorsque des opérations techniques sont justifiées par la sauvegarde de l'ordre public. Mais les FAI ne voient rien venir, et préparent pour l'instant le terrain gratuitement. En la matière, leur lettre est catégorique:

«Si nous travaillons aujourd'hui activement et gratuitement aux procédures et tests techniques préalables à la mise en œuvre des opérations d'identification des adresses IP, nous serons amenés, lorsque-celles ci démarreront, à facturer les pouvoirs publics pour ces opérations et nous le ferons au premier jour» .

L'interprétation de la lettre reste toutefois sujette à caution, variant en fonction de l'opérateur. Chez Free, par exemple, on a longtemps affirmé ne pas vouloir débourser un centime pour Hadopi. Le FAI exige une facturation à 8,5 euros par adresse IP identifiée, tant que le procédé ne sera pas automatisé. Une position qui s'explique aussi par ses représentants, à l'image d' Alexandre Archambault , responsable des affaires réglementaires chez Iliad/Free, et pas vraiment fan de la loi.

A l'opposé, Orange devrait se satisfaire de peu. En juin dernier, devant l'AG des actionnaires , Christine Albanel, ex-Ministre de la Culture devenue directrice exécutive chargée de la communication chez France Télécom, considérait que « le coût [d'Hadopi] pour l'entreprise [sera] infinitésimal » . Une position qui pourrait ne pas être si éloignée de celle de SFR. Non signataire de la lettre, le FAI serait, selon la Tribune , «prêt à payer lui-même les coûts. Une volonté de collaborer apparemment due à son actionnaire Vivendi, supporter déclaré d'Hadopi » . De son côté, Bouygues risque fort de suivre le mouvement. En début de semaine, suite à l'affaire du site de jeu et pari en ligne Stanjames , le FAI a été le seul à bloquer l'accès au site non homologué, à ses frais.

Pour rappel, l'intervention du FAI est capitale dans le dispositif de riposte graduée puisqu'il se charge de fournir à l'Hadopi l'identité de l'individu soupçonné en se basant sur son IP, adresse fournie au préalable à la Haute autorité par les ayants droits. S'ils ne sont pas payés, les fournisseurs d'accès pourraient donc théoriquement bloquer le processus.

Mais tous n'en sont pas déjà au stade des prévisions financières : chez FDN ( French Data Network), la lutte contre Hadopi est toujours de rigueur. Hier, le fournisseur d'accès associatif a déposé un recours en référé devant le Conseil d'État contre le décret «Procédure» d'Hadopi datant du 26 juillet . En mai, ils avaient déjà déposé un recours contre un autre décret , organisant l'interconnexion des données de connexion. Or l'annulation de celui-ci remettrait totalement en cause le décret attaqué hier, qui se base sur les affirmations du premier. Le recours en référé implique la rapidité et l'instance devrait se prononcer sur la question dans le mois qui vient. Une réponse positive pourrait entrainer un énième retard dans la mise en place de la riposte graduée. Mais on commence à être habitué.

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