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Libération

Musique : Les jeunes Britanniques veulent bien payer pour partager

par Camille Gévaudan
publié le 17 juin 2008 à 17h22
(mis à jour le 26 octobre 2009 à 14h53)

Entre les jeunes et la musique, c'est une histoire d'amour. C'est la première observation que fait British Music Rights (représentant les auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) d'après les résultats de l'étude qu'elle a commandée sur la relation qu'entretiennent les Britanniques de 14 à 24 ans avec la musique. L'écoute passive ou active occupe environ 6 heures de leur journée, et leur collection musicale est ce qu'ils emporteraient en priorité sur une île déserte... Comme leurs aînés, ils recommandent leurs artistes préférés à leurs proches, se prêtent leurs disques et se rendent toujours massivement aux concerts, qui représentent 60% de leur budget musique. Mais ce qui les différencie de la génération précédente, bien entendu, est la façon de se procurer cette musique : 63% des 750 participants anonymes avouent télécharger des morceaux illégalement, à raison de 53 titres en moyenne par mois.

La facilité d'accéder à l'ensemble du catalogue musical, permise par la technologie, a ouvert la porte à un comportement d' « expérimentation » : 60% des jeunes téléchargeurs affirment utiliser Internet pour se procurer des oeuvres rares ou hors du circuit commercial (les fameux bootlegs), et la même proportion indique profiter de la gratuité pour "essayer" les albums avant de les acheter. « Ils font des recherches, explorent, découvrent, essayent, évaluent, et recommandent aux autres. La valeur de la musique repose aujourd'hui dans la possibilité de faire toutes ces expériences au sein d'une communauté d'amateurs de musique » , indique l'étude. La valeur de partage serait ancrée dans leur culture, qu'il s'agisse d'échanger avec leurs amis ou de parfaits inconnus : 42% d'entre eux mettent à disposition leurs fichiers musicaux sur les réseaux peer-to-peer. Ils disent estimer juste de rendre aux autres ce qu'ils leur ont offert, et l'étude va jusqu'à leur prêter « un code moral, même s'ils agissent illégalement » . Altruistes, les jeunes évoquent également l'envie de promouvoir les artistes qu'ils affectionnent ou de partager une musique qui n'est pas encore disponible, et la conscience qu'ils accélèrent ainsi le téléchargement chez les autres.

Les jeunes Britanniques semblent toutefois rester très attachés aux supports physiques, possédant en moyenne une centaine de CD (dont seulement 14% de gravés ou copiés) et indiquant à 62,9 % qu'ils continueraient à en acheter même s'ils avaient accès à un peer-to-peer légal. Car les vilains pirates sont prêts à payer leur musique ! 80% d'entre eux se disent intéressés par un service de partage légal, en payant à leur fournisseur d'accès une somme forfaitaire qu'ils voudraient voir reversée aux artistes. Ils posent une condition : pas d'accès en streaming , mais la possibilité de disposer de manière permanente des morceaux achetés, sans DRM.

A la surprise générale, le président de British Music Rights, Feargal Sharkey, n'a évoqué ni la terrible crise de l'industrie du disque ni la mort programmée de la musique comme il semble en avoir l'habitude. Il a au contraire annoncé que «l'industrie de la musique devrait tirer des conclusions très optimistes de cette étude innovante. Avant tout, il est clair que les jeunes mordus de technologie sont aussi passionnés de musique que leurs aînés et la considèrent avec autant de sérieux. Contrairement à ce qu'on croit, ils sont eux aussi prêts à payer pour en profiter. Mais seulement si on leur offre les services qu'ils demandent.»

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