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Libération

Les non-voyants veulent aussi profiter des écrans tactiles

par Stéphanie GOUTTE
publié le 22 janvier 2009 à 16h55

Depuis l'iPhone, l'écran tactile semble devenir le produit incontournable de ces prochaines années. Le “touchscreen” offre l'avantage de pouvoir redéfinir indéfiniment son support. Après Apple, Microsoft se lance aussi dans le tactile avec Windows Seven, dont la version bêta a été lancée début d'année, et qui a été pensée pour cette technologie. L'éditeur a investi 24 millions de dollars avec d’autres sociétés, dans N-Trig, une start-up israélienne spécialisée dans les technologies multi-touch pour écrans d'ordinateurs et de mobiles.

Lors du salon annuel du CES (consumer Electronics Show) qui s'est tenu au début de cette année à Las Vegas, l'Association Nationale des personnes non-voyantes a poussé un coup de gueule, Stevie Wonder en tête. Ils sont venus pour demander aux constructeurs de prendre en compte les besoins des non-voyants. «Certains produits sont déjà accessibles, comme l'iPod et la fonction recherche du Blackberry, que j'aime utiliser» , a indiqué Stevie Wonder, tout en montrant du doigt les écrans tactiles qui imposent une navigation dans de nombreux menus et sous-menus. Pour utiliser cette nouvelle technologie, il faut voir l'écran. Pour l'heure, beaucoup de non-voyants ont recours à un clavier braille. Mais le lecteur d'écran, lui, a un coût prohibitif.

Chris Danielsen, le porte-parole de l'association, ne veut pas ralentir le progrès technologique, et a assuré que réfléchir en terme d'accessibilité n'augmente pas les couts de production. «Penchez-vous sur l'interface et construisez-la de manière à ce qu'elle soit simple , a-t-il lancé à l'attention des constructeurs. Plus l'interface d'un produit est simple d'utilisation, plus de personnes, handicapées ou non, y sont sensibles» .

TV Raman, ingénieur chez Google applique ce raisonnement depuis longtemps, en n'œuvrant pas seulement pour les aveugles, mais pour tous ceux dont la vue baisse. Principaux concernés : les baby-boomers. Aveugle depuis ses 14 ans, TV Raman consacre tout son travail à supprimer les frontières visuelles, du Rubik's Cube en braille (dont il fait une démonstration bluffante), jusqu'à une recherche Google pour aveugles. Avant d'intégrer Google, TV Raman a travaillé pour Adobe où il a participé à rendre les PDF compréhensibles par les non-voyants. «Au lieu de me demander comment un objet peut fonctionner pour quelqu'un qui ne peut pas voir, je me demande comment utiliser cet objet sans qu'on le regarde.»

L'ingénieur travaille aujourd'hui à la modification d'un téléphone à écran tactile. Son support est évidemment Android, le système d'exploitation de téléphone Open Source de Google. Pour ce faire, il utilise un système de positionnement relatif. Le point de départ du clavier se situe sur la touche 5. A partir de ce point central, toutes les autres touches sont définies. Le 1 est en haut à droite, le 8 en bas, etc... Si l'utilisateur se trompe, il lui suffit de secouer le téléphone pour effacer la dernière entrée.

Certains fabricants proposent déjà des interfaces tactiles haptiques, comprenez qui offrent une perception du toucher. Grâce à cette technologie, baptisée “retour haptique”, l'interface réagit au toucher par une vibration qui permet à l'utilisateur de savoir quelle action il vient de réaliser, et de la corriger si besoin. Au lieu de renvoyer des vibrations, l'écran tactile peut bien sûr renvoyer des sons, différents selon le menu, le texte où l'image sélectionnée.

Immersion Corp a ainsi développé la technologie VibeTonz, disponible sur près de 40 millions de téléphones dans le monde. Ce n'est qu'un début, mais si les constructeurs voient dans ce genre de technologie un nouveau produit à vendre au plus grand nombre, le tactile-sans-voir-l'écran émergera sans doute peu après la généralisation du tactile “classique”.

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