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Microsoft : «L’une des firmes les plus rentables»

L’économiste Olivier Bouba-Olga détaille la stratégie derrière le licenciement boursier  de la firme de Redmond.
par Vittorio De Filippis
publié le 23 janvier 2009 à 11h33

Olivier Bouba-Olga est maître de conférence à l'université de Poitiers et auteur d'un ouvrage sur les Nouvelles Géographies du capitalisme (Seuil).

Le plan de licenciement est-il une remise en cause de la stratégie de Microsoft, ou vise-t-il à envoyer des signes aux marchés ?

_ L’analyse est pour le moins surprenante. D’abord, on constate que les ventes du groupe baissent, entraînant une légère chute des profits. Mais il est aussi de notoriété que cette entreprise reste l’une des plus rentables au monde.

Il n’est pas improbable que la réponse de Microsoft soit aussi une stratégie de communication. Stratégie qui consisterait alors à rejeter la cause d’une telle annonce du côté des marchés financiers. Indirectement, Microsoft nous dirait donc : «Regardez, si nous avons décidé d’adopter ce plan de licenciement, c’est surtout la faute aux marchés financiers.»

Malgré ses profits de 4 milliards de dollars au deuxième trimestre de son exercice 2008-2009, Microsoft céderait à la pression financière pour imposer des licenciements boursiers ?

_ Oui, mais il y a un bémol. D’ordinaire, on imagine que les licenciements boursiers se traduisent rapidement par une hausse des cours de l’entreprise qui licencie. Or, les études qui nous viennent des Etats-Unis sont formelles : en moyenne, les licenciements boursiers provoquent une légère baisse des cours des actions. Mais il s’agit d’une moyenne. Il se peut donc que cer­taines entreprises qui diminuent leurs effectifs finissent par engranger une hausse du cours des actions...

Peut-on expliquer autrement cette ­première restructuration de l’histoire de Microsoft ?

_ Il est indéniable que nous sommes dans une période particulière. Les décisions reflètent plus que jamais les craintes que les dirigeants d’entreprises se font du monde de demain. Autrement dit, il est probable que Microsoft voit l’avenir en noir. Anticipant du même coup une contraction de ses ventes à venir. Et donc de ses effectifs.

Une sorte de syndrome des «prophéties autoréalisatrices» ?

_ Oui. Nous entrons de plus en plus dans un univers économique qui, justement, adopte ce type de comportement. A force de voir l’ensemble des acteurs de l’économie redouter le pire des scénarios, il finit par se réaliser. Certes, il peut y avoir une part d’objectivité dans la récession qu’on anticipe. Mais si tout le monde anticipe au même moment un recul de l’activité, il se réalisera non pas parce qu’il devait se réaliser mais simplement du fait que tous pensent qu’il va se produire.

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