Musique en ligne : les artistes y perdent

par Christophe Alix
publié le 14 novembre 2007 à 12h32
(mis à jour le 14 novembre 2007 à 15h50)

Les interventions et propositions se multiplient à la veille de la remise des conclusions de la mission Olivennes sur la lutte contre le téléchargement illégal et les nouveaux services de commercialisation de contenus numériques. Favorable à une solution de type « licence globale », l'alliance public-artistes qui réunit des associations de consommateurs et d'internautes et des sociétés de gestion collective (Adami, Spedidam) met en garde le PDG de la Fnac contre son ralliement à des solutions qui ne privilégieraient pas « le plus grand nombre » en conciliant « l'accès à la culture pour tous avec les intérêts des ayants-droits » . Une formule un peu alambiquée pour sensibiliser la mission Olivennes et la ministre de la culture Christine Albanel à ce que l'alliance Public-Artistes considère comme une régression à l'ère de la musique numérique: l'affaiblissement de la part reversée aux artistes dans les ventes de musique en ligne.

Chiffres à l'appui, l’Alliance Public-Artistes fustige la très faible part du prix payé par les acheteurs effectivement reversée aux artistes lors d’un achat de musique en ligne. Sur 1 € HT, les auteurs (7 centimes), les chanteurs (4 centimes) et les musiciens (0 centimes, ils ne sont payés qu'à l'enregistrement), ne se partagent que 11 centimes tandis que les sociétés de production captent entre 85 et 90 centimes. Selon le collectif, le maintien d’une répartition aussi inéquitable est non seulement préjudiciable aux artistes mais également contraire à la volonté des acheteurs. Selon un sondage commandé par l'alliance Public-Artistes à la société d'études Stratégir, plus des trois quarts des acheteurs considèrent que la rémunération des artistes est insuffisante après avoir été informés de la part revenant réellement aux créateurs. Ils sont en revanche 92% à penser que la part revenant aux maisons de disque est trop élevée.

L'étude insiste également sur le fait que la plupart des acheteurs sont tenus dans « l'ignorance » des sommes qu'ils pensent verser aux artistes lorsqu'ils achètent de la musique en ligne. En effet, 51% des acheteurs pensent à tort que plus de 20 centimes sont reversés aux artistes. Et les commanditaires de l'étude d'enfoncer le clou : «cette situation est aussi contreproductive» , en faisant valoir que 64% des acheteurs interrogés seraient disposés à acheter davantage de musique en ligne si une part plus importante du prix était effectivement reversée aux artistes.

Les initiateurs de l'alliance Public-Artistes comme Bruno Ory-Lavollée, gérant de l'Adami, ne se contentent pas de lier le développement de l'achat de musique en ligne à l'augmentation de la part du prix de vente perçue par les artistes. Ils font également valoir qu'avec une structure de coûts inférieure, l'économie de la musique à l'ère numérique devrait favoriser une baisse des prix de vente (à l'unité et sous forme d'albums) plus forte que celle constatée jusqu'ici et la floraison d'un grand nombre de plateformes indépendantes découragées de ne pouvoir accéder facilement aux catalogues. « Le cas de l'offre illimitée neuf-Cegetel est révélateur, explique Bruno Ory-lavollée, elle ne concerne que le catalogue de la première des majors, Universal. Ce n'est pas normal. »

Pour le collectif, une baisse des prix et l'abandon définitif des DRM (verrous anti-copie) seraient largement compensés par la hausse des volumes de ventes. « Au final, tout le monde serait gagnant » , conclut Bruno Ory-Lavollée après qu'un de ses collègues de l'alliance ait plaidé pour « une régulation des prix de gros des catalogues afin de faire baisser les prix de détail » . Le modèle de la téléphonie ou du commerce alimentaire appliqué à l'industrie du disque.

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